jeudi 30 octobre 2008

Le Nestlégate helvético-brésilien

Nestlé, Securitas & ATTAC : un polar de l'ère de la mondialisation
«Le politique devrait réprimander Nestlé!»-Interview de Franklin Frederick sur le Nestlégate en Suisse
par Isabelle Stucki

INTERVIEW - Engagé contre la privatisation de l'eau, le Brésilien Franklin Frederick est scandalisé par le «Nestlégate» et par le peu de réactions que l'affaire suscite dans la sphère politique.

Il est indigné, Franklin Frederick, lui qui se bat contre Nestlé pour sauver le parc d'eau de São Lourenço, au Brésil. Voici trois mois, l'émission Temps Présent révélait que Nestlé avait mandaté l'entreprise Securitas pour infiltrer le groupe Attac-Vaud. En possession du rapport, Franklin Frederick constate que l'opération le touche de près. Et qu'elle est remontée jusque dans son pays. Pour le militant, ce n'est pas le pire: la faible levée de boucliers face à cette affaire «gravissime» le choque. Entretien.


Franklin Frederick. Photo Olivier Fatton, Le Courrier


Qu'est-ce qui vous frappe dans ce rapport?

Franklin Frederick: Sa réalisation est très professionnelle. Sa première page s'ouvre sur le 2 septembre 2003. Il est question de l'organisation du Forum social suisse qui a eu lieu à Fribourg en septembre 2003 et auquel j'allais être invité pour parler du cas de Nestlé au Brésil. La dernière page du rapport est datée du 16 mai 2004. L'opération d'espionnage ayant duré plus d'une année, ce rapport est incomplet. Et comme nous n'avons pas reçu une réponse positive à la demande de notre avocat d'obtenir tous les documents, ce que nous avons entre les mains n'est que la pointe visible de l'iceberg.

Etiez-vous spécialement visé?

En tant que défenseur de l'eau au Brésil, j'étais une cible de cette opération, autant qu'Attac ou que les Colombiens, mentionnés dans le rapport. La quantité et le détail des informations sur ce qui se passe au Brésil et sur ma personne s'accroissent au fur et à mesure du document. Même mon entrée en Suisse, qui s'est faite par Neuchâtel – où les militants d'Attac ont défendu la source de Bevaix contre Nestlé–, est citée. L'agente de Securitas avait des contacts réguliers avec Nestlé. Peu à peu, son travail s'est focalisé sur le forum Nestlé que Attac, la Déclaration de Berne, Greenpeace et moi-même avons organisé en juin 2004 à Vevey.
Pour la première fois, des gens de multiples provenances se sont retrouvés pour mettre leurs savoirs en commun et parler des lieux où Nestlé pose des problèmes. Nous avons réalisé que ces cas ne sont pas uniques: Nestlé a un modèle, toutes ces situations sont similaires et appartiennent à la politique globale de Nestlé, décidée en Suisse.

Quel était l'intérêt pour Nestlé de vous espionner?

Pourquoi est-ce que Nestlé a décidé d'espionner Attac-Vaud? Certes, il y a le livre très important que le groupe écrivait sur Nestlé. Mais une des grandes motivations de la multinationale était d'obtenir, par le biais d'Attac, des renseignements sur ce que les groupes de résistance font au Brésil et en Colombie. Dans ces pays, les informations fournies par le rapport, dont mon e-mail, peuvent avoir une utilité concrète. Nestlé était en mesure de coordonner ses activités, de devancer nos stratégies et d'adapter les siennes. Si Nestlé connaît mes contacts, je ne sais pas quel genre de pressions, notamment auprès des politiciens, peuvent être exercées au Brésil: ce pays a une tradition démocratique plus faible que celle de la Suisse.



Le Parc des Eaux de São Lourenço


Vous dites que les faits de 2004 viennent de s'éclairer...

Au début de 2004, j'annonçais à Attac et à l'espionne inclue dans notre liste d'adresses que je viendrais en Suisse pour le Public Eye et l'Open Forum, événements organisés en parallèle au Forum économique mondial de Davos. J'ai sollicité, en vain, un entretien avec Nestlé. Mais à l'Open Forum, j'ai pu m'adresser à Peter Brabeck (ancien directeur général de Nestlé, ndlr). Comme il avait été renseigné, il savait que je serais là. Il était préparé. Il a alors annoncé cette nouvelle inattendue: l'usine de São Lourenço, située dans le parc d'eau que je défends, serait fermée et le pompage cesserait. En même temps, avec une parfaite synchronisation qui n'aurait pas pu avoir lieu sans les informations de l'espionne, Nestlé établissait des contacts avec le gouvernement de l'Etat de Minas Gerais, où se trouve São Lourenço. Nestlé a conclu un «gentlemen's agreement» pour y rester. Le jour où la presse suisse racontait notre «victoire», l'Etat du Minas Gerais annonçait un accord avec Nestlé: la multinationale s'était racheté le droit de rester...

Pourquoi le groupe Nestlé userait-il d'une telle stratégie?

La presse suisse avait passablement médiatisé le cas du Brésil. La multinationale déteste cette visibilité que lui confèrent les médias quand ils la critiquent. Nestlé subissait une sorte de pression de la part des églises nous soutenant et de la presse. Annoncer que le cas était résolu ferait taire tout le monde.



Fontaine dans le Parc des Eaux. Photo Gil


Le soutien de certaines églises dérange-t-il Nestlé?

Oui. Quand les critiques proviennent d'ONG cataloguées à gauche, Nestlé est habituée à riposter. Mais les remarques des églises ont un poids différent. Nestlé ne peut y répliquer de la même façon. Les diverses églises de Suisse qui épaulent notre lutte contre la privatisation de l'eau, dont l'Eglise réformée de Berne ont émis des critiques. A mesure que ces remarques se multipliaient, je devenais une cible plus importante pour Nestlé.

Comment percevez-vous les réactions suscitées par l'affaire?
Le manque de réactions fortes face à ce scandale est un scandale en soi! Un débat public devrait absolument avoir lieu. Que font les politiciens? Une réponse très sévère à l'attitude de Nestlé est nécessaire. Ce genre de pratiques est à bannir définitivement: quand cela commence, on se retrouve dans une zone trouble et dangereuse.

Craignez-vous votre retour au Brésil?
La lecture des rapports et le fait que la multinationale se donne le droit de poursuivre de telles opérations si elle se sent menacée m'inquiètent. Jusqu'à quel niveau suis-je surveillé dans mon pays? Je ne me sens pas en sécurité. Une limite a été franchie. C'est très grave: en Amérique latine, nous savons où ce type d'espionnage conduit! En l'occurrence, il me semble qu'un citoyen suisse ne peut être menacé physiquement. Mais il n'en va pas de même en Colombie et au Brésil.


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mercredi 29 octobre 2008

Pourquoi je voterai(s) mardi prochain pour l’Oncle Jack et pas pour Beaufils Baracké Idéal

par Ayman EL KAYMAN
Imaginons 5 minutes que je sois un humain, vivant quelque part entre l’Atlantique et le Pacfique, disposant de tous mes papiers en règle et citoyen de la plus belle démocratie du monde. Le 4 Novembre, dès l’aube, à l’heure où blanchit l’autoroute et rougeoie encore l’enseigne du McDo alors que celle du KFC clignote, je me rendrai donc à mon bureau de vote. Et je déposerai mon bulletin dans l’urne. Et ce sera celui de mon seul héros vivant, j’ai nommé Johnny McCain, Héros Rescapé de la Grande Guerre Patriotique contre le Bolchevisme Asiatique et de sa ravissante cocandidate, la Reine de l’Alaska, Sarah-la-Pâlichonne-qui-tire-plus-vite-que-son-ombre. Pourquoi donc vas-tu voter pour cet horrible républicain quasi-facho et cette pétasse paléolithique ? Me demanderez-vous, avec un hoquet d’indignation. Je vous répondrai brièvement : seul l’Oncle Jack est capable d’achever le boulot si bien engagé par Jojo l’Ahuri

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La Précolombie est en marche

L’autre Colombie
par Raúl Zibechi
"Quelque chose de nouveau est en train de mijoter dans ce pays", dit Alfredo Molano, journaliste et sociologue poursuivi par le régime uribiste -parce qu’il dit ce qu'il voit, et qu’il dit tout haut ce que pensent tout bas des millions de Colombiens auxquels les médias sont inaccessibles. Il ne le dit pas dans un local clos, mais à ciel ouvert dans le Forum de la Solidarité de Moravia, quartier pauvre de Medellín construit sur une énorme montagne de déchets que les déplacés dus aux guerres successives ont transformé en une trame urbaine, périphérique et solide, basée sur un réseau de solidarité impressionnant.
Ce qui est nouveau, c’est l'ampleur, l'extension et la profondeur de la protestation, et surtout la confluence d'acteurs qui sont en train d’acculer le gouvernement d'Álvaro Uribe. Les grèves les plus mises en évidence par les médias sont celles du secteur public pour les salaires, ou de la branche judiciaire qui a amené le gouvernement à décréter l'état de "commotion intérieure"
[1]. Ont suivi ensuite les fonctionnaires du Registre national de l’État-Civil (Registraduría[2]), les enseignants, les camionneurs et autres employés publics qui voient leurs salaires décimés par l'augmentation incessante des prix. C’est, toutefois, la convergence d’en bas qui donne le plus d’insomnies à ceux qui sont au pouvoir...
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En Colombie, la mobilisation indigène avance, entre assassinats et atrocités
par Juan Alberto SÁNCHEZ MARÍN
La mobilisation massive en cours rassemblera quelque 30 000 indigènes qui, depuis la semaine dernière, ont été victimes d’assassinats et d’abus de la part des forces publiques. La marche focalise l’attention sur les accords trahis par le gouvernement et entend mettre un terme aux assassinats de dirigeants indigènes. La protestation, qui s’est déjà étendue à 16 des 32 départements, a été criminalisée par le gouvernement. Marlitt Pusecc, Conseillère du Conseil Régional Indigène du Cauca, a parlé sur la radio YVKE. Elle a alerté sur le risque d’un génocide.

En Colombie, comme dans le reste de l’Amérique Latine, les indigènes n’ont pas été seulement exclus, expropriés et brimés. Il ont surtout fait partie de l’oubli. Un oubli pratique et stratégique. Une absence de mémoire absolue et mal intentionnée qui permet que les indigènes n’existent pas pour le reste de la société.
Bien qu’ici, ils aient été les premiers, nous ne nous en souvenons pas. Même si pendant 516 ans nous les avons presque fait disparaître, l’histoire hier et les médias aujourd’hui l’expliquent et le justifient comme une chose naturelle, une mesure nécessaire face à des sauvages. Malgré que nous les ayons convertis à une foi infâme avec un ciel bouché, nous ne nous sommes pas rendu compte de l’enfer dans lequel nous les avons laissés. Bien qu’ils soient toujours ici et maintenant, marginalisés dans leurs réserves, nous ne les voyons pas, nous ne les entendons pas, ils ne comptent pas.
Dans d’autres parties de la région, beaucoup de peuples originaires ont élevé leur voix et se sont fait entendre. En Bolivie, un indigène préside aux destinées du pays, bien sûr au milieu de l’opposition la plus féroce. La Confédération des Nationalités Indigènes de l’Equateur, la CONAIE, est un exemple de résistance, et avec ses mobilisations massives elle a fait et défait plusieurs présidents.
Dans un pays où les voix dissidentes, différentes ou minoritaires sont rejetées à feu et à sang, les malheureux indigènes colombiens ont été les victimes de l’assassinat sélectif de leurs dirigeants, des massacres et de la violence des acteurs armés d’un conflit endémique qui sévit sur leurs territoires.

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lundi 27 octobre 2008

Prince Johnson : C'est Compaore qui a fait tuer Sankara, avec l'aval d'Houphouët-Boigny

par RFI, 27/10/2008

C'est une exclusivité RFI. Pour la première fois depuis son passage spectaculaire devant la commission Vérité et réconciliation le 29 août, Prince Johnson, l'ancien chef rebelle libérien, a donné des détails ce week-end sur son rôle dans la mort du président burkinabè, tué en octobre 1987. Cette fois-ci c'est au micro de RFI qu'il s'est confié. A l'époque, Prince Johnson s'entraînait au Burkina Faso. Selon lui la mort de Sankara aurait été décidée par son bras droit et successeur, l'actuel numéro un burkinabè Blaise Compaoré, avec l'aval du président ivoirien de l'époque, Félix Houphouët-Boigny. Blaise Compaore a toujours démenti avoir joué le moindre rôle dans la mort de Thomas Sankara.

Prince Johnson a d’abord rendu hommage à l’ancien président burkinabè, qui pour lui était un homme exceptionnel, aimé par son peuple et par le monde extérieur. Mais il fallait se débarrasser de lui : « La seule option pour notre formation, rester au Burkina puis aller en Libye, était de répondre positivement à la requête de Blaise, c’est-à-dire se débarrasser de Thomas Sankara qui était contre notre présence au Burkina ».
A la question de savoir s’il a été facile de se débarrasser de Thomas Sankara, Prince Johnson répond que le vrai maître des lieux à cette époque-là était plutôt l’actuel président : « Franchement, Sankara n’était qu’un chef cérémonial, c’est Blaise Compaore qui contrôlait tout, les casernes et la garde présidentielle donc il était très facile de s’infiltrer ».
Prince Johnson est allé plus loin en citant le nom de l’ancien président ivoirien, Félix Houphouët Boigny : « Il voulait la chute de Sankara pour que nous puissions suivre notre formation et retourner au Liberia pour tuer Doe (Samuel K. Doe, président du Liberia à cette époque, NDLR) parce que Doe a tué son beau-fils, William Tolbert junior... »

Source : http://rfi.fr/actufr/articles/106/article_73998.asp


Me battre à mort pour Thomas Sankara
Message de Myriam Sankara, veuve du Président Thomas Sankara à l'occasion du 21ème anniversaire de son assassinat .

Mes Chers Camarades,
A l'occasion de la commémoration du 21ème anniversaire de
l'assassinat le 15 octobre 1987du Président Thomas Sankara et de 12
de ses compagnons, je suis heureuse de constater que vous êtes
toujours là aussi nombreux que d'habitude, pour ce rendez annuel de
la mémoire et du recueillement.
Il est important pour mes enfants et moi-même ainsi que pour toute
la famille Sankara et tous ceux qui sont attachés à l'idée même de
justice et de dignité humaine, de sentir que malgré toutes ces
longues années passées, des hommes, des femmes, des jeunes, au
Burkina Faso et un peu partout dans le monde continuent à se
mobiliser pour que l'œuvre et les idéaux de justice, d'intégrité et
de dignité défendus par le Président Thomas Sankara ne soient jamais
oubliés, malgré tous les efforts déployés par le régime pour effacer
ses traces.

Il est important pour le triomphe de ces idéaux, que des hommes et
des femmes continuent à redoubler de détermination au Burkina Faso
et partout dans le monde pour que les auteurs de cet ignoble
assassinat soient punis, malgré les entraves judiciaires et
politiques dressées délibérément depuis des années par le pouvoir
burkinabé contre notre combat.
Aussi, je réitère avec force et fermeté que malgré le déni de
justice dont mes enfants et moi-même sommes victimes, malgré le
refus des juridictions burkinabé d'instruire cette affaire
conformément aux recommandations pertinentes de l'Onu concernant la
saisine du Tribunal Militaire sur ordre du Ministre de la Défense
que nous n'avons cessé de réclamer, malgré les diversions, les
mensonges, les obstacles dressés sur notre chemin par le pouvoir
burkinabé, nous ne baisserons jamais les bras et continuerons à
lutter.

Tant que la lumière ne sera pas faite sur l'assassinat du Président
Thomas Sankara, nous continuerons à nous battre par tous les moyens
de droit pour que justice soit faite. Nous continuerons à le faire
parce que la mémoire de mon époux l'exige. Nous continuerons à le
faire parce que les Burkinabé et les Africains veulent connaître la
vérité. Nous continuerons à mener ce combat parce que nous ne nous
satisferons jamais de cette culture d'impunité et de violence
politique qui sévit au Burkina Faso et dans de nombreux pays
africains malgré des démocraties de pure façade.
Notre détermination est d'autant plus grande aujourd'hui que les
récentes révélations devant le Tribunal spécial pour le Liberia, des
anciens compagnons de Charles Taylor comme John Tarnue, ancien
commandant des forces du Liberia ou celles de l'ancien chef de
guerre Prince Johnson devant la Commission Vérité et Réconciliation
au Liberia, relayées par la presse nationale et internationale, ont
mis clairement et directement en cause Monsieur Blaise Compaore lui-
même dans le renversement et l'assassinat du Président Thomas
Sankara et de 12 de ses compagnons le 15 octobre 1987.

Nous ferons tout ce qui est possible auprès des instances les plus
indiquées sur le plan national et international pour lesquelles les
mots Justice, Etat de droit, Dignité humaine ne sont pas de mots
vains et creux pour que notre cause soit entendue; nous continuerons
à interpeller les autorités Burkinabé devant ces instances pour que
les auteurs de cet horrible massacre soient jugés comme le sont à
juste droit dans le monde les auteurs des crimes graves, comme l'est
d'ailleurs aujourd'hui Monsieur Charles Taylor avec lequel - selon
les deux criminels cités plus haut - Monsieur Blaise Compaore a
signé le pacte de sang qui a conduit à l'assassinat de mon époux et
de 12 de ses compagnons.
Je sais que vous continuerez à soutenir ce combat qu'aucune
indemnité financière ne pourra compenser tant que les assassins du
Président Thomas Sankara seront vivants et continueront à bénéficier
d'une totale impunité et à parader ici et là dans le monde. Je sais
que vous continuerez à soutenir ce combat étroitement lié à celui de
l'avènement d'une vraie démocratie et d'un vrai développement au
Burkina Faso et dans bon nombre de pays africains largement viciés
par cette impunité.

Qu'il me soit permis à cet effet de remercier tous les avocats du
Comité International Justice pour Thomas SANKARA, pour le précieux
appui qu'ils m'apportent gracieusement depuis des années dans ce
combat ainsi que tous ceux qui, au Burkina Faso, en Afrique et dans
le monde, continuent, depuis 21 ans à œuvrer pour que triomphent les
idéaux du Président Thomas Sankara, tous ceux qui se dressent contre
l'injustice, l'oppression, la misère, au moment où la déroute
actuelle du libéralisme un peu partout démontre à quel point, les
idéaux que défendait Thomas Sankara restent d'actualité, et que se
pose aujourd'hui plus que jamais, la nécessité d'un ordre
international plus juste.

Merci à tous les Sankaristes de continuer courageusement cette lutte
sur le plan politique et social depuis des années. Je ne peux que
les encourager à travailler pour la mise en place d'un projet de
société qui prendra assise sur les idées de celui qui a incarné et
continuera à incarner l'espoir de tous ceux qui, au Burkina Faso, en
Afrique et dans le monde, s'élèvent quotidiennement contre les
injustices sociales et se battent pour leur dignité, leur
autodétermination, ceux qui refusent l'état de survie, la
corruption, le népotisme, la destruction de la nature,
l'exploitation de l'homme par l'homme.

Merci encore au peuple burkinabé et à sa jeunesse pour sa formidable
mobilisation autour du 20ème anniversaire l'année dernière.
Merci de m'avoir reçu si chaleureusement lors de ces inoubliables
moments à jamais inscrits dans la page de notre histoire et qui nous
donnent aujourd'hui la force de continuer ensemble à nous battre
avec plus de détermination qu'avant, pour faire en sorte que chaque
centimètre carré de nos vies devienne, comme le voulait le Président
Thomas Sankara, "un centimètre carré de liberté et de dignité " pour
que,
Vive le Burkina Faso !
Vive l'Afrique!
Je vous remercie pour votre indéfectible soutien.
Montpellier le 15 octobre 2008

Colombie : Guerre sale et terreur contre le mouvement indigène

par ACIN

D’où que viennent les balles assassines, cette guerre est contre les peuples. Quelle que soit l’origine du plan meurtrier, son résultat bénéficie aux intentions de ceux qui veulent nous dépouiller de notre processus et de notre territoire. Ces actes calculés de lâcheté et de cruauté, de la part d’hommes armés de fusils contre des civils et des comuneros*, ont pour objectif de nous réduire au silence et de nous engager dans une guerre contre nos droits et nos plans de vie.


Plus de 7000 indigènes et représentants d’autres secteurs sociaux et populaires du Cauca et du Sud-Ouest Colombien sont rassemblés en ce moment dans le Territoire de Paix, de Négociation et de Vie en commun de La María Piendamó dans le Cauca. C’est ainsi qu’a commencé la Minga de célébration des 516 ans de résistance et que se consolide le “Branle-bas des Peuples” de résistance au régime de terreur du capital transnational. Simultanément, arrivent des rapports sur les actions et rituels qui s’annoncent dans le reste du pays de la part des peuples indigènes.



Dans la soirée du 12 octobre, l’Assemblé des Peuples réunie en Minga à La María a assisté à des actes protocolaires d’installation de la Minga et a écouté les paroles des autorités [communautaires, NdR]. L’agenda des tours à venir prévoit des réunions et des rencontres avec des dirigeants et des représentants d’autres mouvements sociaux et populaires.


La réaction des ennemis des peuples contre notre lutte pour la justice et le respect ne s’est pas faite attendre. Le langage de terreur et de mort assombrit cette heure de dignité.


Nous écoutons les paroles émouvantes de Ligia Coicué, compagne du comunero assassiné Nicolas Valencia Lemus et celles de son frère, le dirigeant indigène Silvio Valencia. Pendant que nous écrivons cette note, affligés par ce crime, nous recevons confirmation de l’assassinat d’un autre comunero indigène identifié comme Celestino Rivera, jeune de 25 ou 27 ans de la réserve indigène de Jambaló et habitant la fraction de Zumbico. Son corps sans vie a été retrouvé à 2 mètres du chemin de Toribío à Jambaló, dans fraction de Quinamayó. Le cadavre portait au moins les traces de deux coups de fusil dans le crâne. Des comuneros des alentours disent avoir entendus 4 coups de feu vers 9 heures et demie de samedi soir 11 octobre, suivis du bruit d’une motocyclette qui démarrait.



En même temps, la Conseillère Principale du CRIC (Conseil régional indigène du Cauca) a reçu un appel du gouverneur du Cauca l’avertissant de rapports des services de renseignement mettant en évidence l’intention de la colonne Teófilo Forero des FARC d’assassiner le dirigeant indigène et Conseiller du CRIC Feliciano Valencia. Il semble que la Conseillère ait réussi à enregistrer la conversation avec le gouverneur. Il ne nous a pas été possible de contacter la Conseillère au moment de la redaction de ce communiqué.

Depuis les menaces du CEC [« Campesinos Embejucados del Cauca », « Paysans furieux du cauca », groupe terroriste clandestin, NdT], envoyées le 11 Août 2008, ont été assassinés 5 indigènes dans le Nariño, 3 à Riosucio Caldas et 3 dans le Cauca (le gouverneur de Canoas en a réchappé). Ont par ailleurs été assassinés un dirigeant afro (noir, NdT) à Tumaco, deux dirigeants paysans du Cauca ainsi que Olga Luz Vergara -de la Route Pacifique des Femmes- et sa famille à Medellín.



D’où que viennent les balles assassines, cette guerre est contre les peuples. . Quelle que soit l’origine du plan meurtrier, son résultat bénéficie aux intentions de ceux qui veulent nous dépouiller de notre processus et de notre territoire. Ces actes calculés de lâcheté et de cruauté, de la part d’hommes armés de fusils contre des civils et des comuneros, ont pour objectif de nous réduire au silence et de nous engager dans une guerre contre nos droits et nos plans de vie. Qu’ils s’en aillent, ceux qui apportent la guerre, ceux qui usent des armes contre la vie, ceux que se servent de la mort pour nourrir leur rapacité. Qu’ils dégagent!

* Comuneros : habitants des communautés (comunidades), paysans indigènes. En 1781, un soulèvement dit des comuneros eut lieu dans l’actuelle Colombie, (vice-royaume de Grenade), annonçant les mouvements d’indépendance du siècle suivant.(NdT)

Pour plus d’information sur la mobilisation en cours, consulter:
ONIC et NASACIN


Écouter les audios sur les mobilisations:
10/12/2008
Asesinado Comunero Indígena vía a Toribío, Cauca
10/12/2008
Actividades del 12 de octubre de 2008 en Boyacá y los Santanderes
10/12/2008
Actividades del 12 de octubre de 2008 en Casanare
10/12/2008
Minga del pueblo Embera Chamí 12 de octubre de 2008
10/12/2008
Minga pueblos Indígenas en el Cauca 12 de octubre de 2008
10/12/2008
Minga pueblos en La Guajira 12 de octubre de 2008
10/12/2008
Minga de los pueblos en el Quindío 12 de octubre de 2008
10/12/2008
Último avance Minga de los pueblos en el Cauca 12 de octubre de 2008


Source : Colombia: Guerra sucia y terror contra el movimiento indígena

Article original publié le 12 Octobre 2008

Sur les auteurs

Traduit par Nuria Álvarez Agüí et révisé par Fausto Giudice, Tlaxcala

dimanche 26 octobre 2008

Les Chagossiens perdent le droit au retour dans leur archipel

par Duncan Campbell & Mathew Weaver

Les juges de la Chambre des lords britannique ont statué par 3 contre 2 que les Chagossiens, expulsés dans les années 1970, ne pouvaient pas revenir sur leur terre.

Les anciens habitants des Chagos, expulsés par le gouvernement britannique dans les années 1970, ont aujourd'hui perdu leur longue bataille pour le droit au retour dans cet archipel de l'Océan Indien.

Les Chagossiens avaient précédemment gagné leur droit au retour sur toutes les îles de l'archipel hormis Diego Garcia, l'île principale transformée en base militaire usaméricaine.

Le jugement d'aujourd'hui, à une majorité de 3 contre 2, a renversé la victoire des Chagossiens et constitue l'étape finale d'une bataille juridique qui a commencé il y a 10 ans.

Lord Hoffmann a décrété que le gouvernement avait le droit de légiférer pour un territoire si c'était dans les intérêts de sécurité du Royaume Uni.

Le Département d’État US avait argué que les îles pouvaient être utiles aux terroristes.



Lord Hoffmann a déclaré : «Certains de ces scénarios peuvent être considérés comme des spéculations fantaisistes mais dans l'incertitude actuelle, le gouvernement a le droit de prendre en considération les préoccupations de ses alliés.»

Il a rejeté l'argument développé par les avocats des Chagossiens selon lequel le gouvernement n'avait pas le pouvoir de retirer aux habitants le droit de demeurer dans ce qui est maintenant connu officiellement comme le Territoire Britannique de l'Océan Indien (BIOT). «La loi donne ce droit et la loi peut le reprendre», a t-il ajouté.

Lord Rodger et Lord Carswell ont approuvé. Lord Bingham et Lord Mance ont protesté.



Le Chagossien Olivier Bancoult, qui a mené la campagne pour le retour des Îlois dans l'Archipel des Chagos, d'où ils ont été chassés pour faire place nette à une base aéronavale US


Olivier Bancoult, le Chagossien expulsé qui s'est engagé dans la procédure judiciaire, dès le début, en 1998, a déclaré après le jugement : «Nous sommes profondément déçus mais bien sûr, nous poursuivons la lutte. Nous sommes en train de consulter nos avocats pour décider de ce que nous pouvons faire.»

Bancoult a vivement conseillé aux ministres de lire les déclarations des juges qui ont voté contre la décision. «Ils devraient mettre fin à la transformation honteuse des Chagossiens en victimes et adopter une politique légale facilitant le retour dans notre pays.»

Les Britanniques avaient pris les îles Chagos à la France durant les guerres napoléoniennes. En 1971, le gouvernement britannique utilisa une ordonnance d’immigration pour déporter tous les habitants afin de faire de Diego Garcia une base militaire us américaine.

Aussi bien la cour restreinte (divisional court : réduite à deux juges, NdR) de la Haute Cour que la Cour d'Appel avaient précédemment statué que les Chagossiens pourraient revenir sur les autres îles de l'archipel. Le Foreign Office (Ministère des Affaires étrangères) avait fait appel de ces jugements devant la Chambre des Lords.

Le ministre des Affaires étrangères, David Miliband, a accueilli le jugement d'aujourd'hui comme une justification de la décision du gouvernement de faire appel.

«Nous ne cherchons pas d'excuse à la conduite d'une génération précédente. Notre appel devant la Chambre des Lords ne concernnait pas ce qui s'est passé dans les années 1960 et 1970. Il concernait les décisions prises dans le contexte international de 2004.

«Il nous fallait prendre en compte des problèmes de défense et de sécurité de l'archipel et le fait qu'une étude indépendante se soit fortement prononcée contre la faisabilité d'une réimplantation durable sur les îles du BIOT.»

Dans son opinion dissidente, Lord Bingham a déclaré nul et illégal, un décret pris en 2004 qui déclare, sans l'autorité du parlement, que personne n'a le droit de s’établir dans les îles Chagos pour y résider.

Le pouvoir de légiférer sans avoir recours au parlement était «une survivance anachronique», a-t-il déclaré. On ne peut pas se libérer du devoir de protection simplement en chassant et expulsant le citoyen de sa patrie.»

Lord Mance a indiqué que les facteurs qui justifient ce décret étaient fondés sur «un risque infime et improbable» de réimplantation à grande échelle de l'archipel des îles de Chagos.

Richard Gifford, avocat des Chagossiens, a déclaré : «Pour le malheur des habitants des Chagos, les aléas de la politique internationale les empêchent depuis quarante ans de rentrer chez eux.»

"Le combat pour retrouver leur paradis perdu ne peut aboutir pour des raisons juridiques mais il reste des possibilités politiques, et le parlement, l'opinion publique, la communauté internationale peuvent encore les soutenir", a-t-il ajouté.

Les Law Lords ont été informés durant l'audience de juillet que l'île de Diego Garcia était considérée par les USA, depuis les attentats terroristes du 11 septembre, comme «une base défensive de la plus haute importance... un pilier pour les alliés du Royaume-Uni.»

Le Foreign Office avait argumenté que permettre aux Chagossiens de revenir serait une opération «précaire et onéreuse» et les USA ont déclaré que ceci présenterait également un risque inacceptable pour leur base militaire.

Bien qu'il y ait eu des «aspects incontestablement peu ragoûtants» dans ce qui est arrivé aux Îlois dans les années 1970, ce n’était plus cela qu’on jugeait, a indiqué aux Lords le bâtonnier Jonathan Crow, Conseiller de la Reine, au nom du ministre des Affaires étrangères. «Les Chagossiens ne possèdent aucun territoire,» a déclaré Crow. «Ils n'ont aucun droit de propriété sur les îles. Ce qu’ils revendiquent, c’est un droit à l’intrusion en masse.»

Il y a dix ans, les Chagossiens ont commencé une action judiciaire pour leur droit au retour et, en 2000, la chambre restreinte de la Haute Cour de justice de Londres reconnaissait l'illégalité de leur expulsion. Le Ministre des Affaires étrangères de l'époque, Robin Cook, leur consentit le droit de revenir dans leur archipel à l'exception de l'île de Diego Garcia. Mais après les attentats du 11 septembre 2001, les USA ont déclaré que Diego Garcia était devenu une base militaire importante pour les guerres en Afghanistan et en Irak.

En 2004, le gouvernement britannique émit des décrets-lois qui annulèrent la décision de la cour, mais deux ans plus tard, la Haute Cour rendit un jugement favorable aux Chagossiens. En mai de l'année dernière, le gouvernement perdait à nouveau en appel. En novembre, les Lords accordèrent au gouvernement la permission de faire appel mais lui ordonnèrent de payer tous les frais juridiques quelle que serait la sentence.

Une étude récente a montré que le petit nombre de Chagossiens susceptibles de vouloir rentrer de façon permanente dans leur archipel, serait capable de subvenir à leurs besoins.

Cette étude, soutenue par la campagne humanitaire «Let them return» (Laissez-les revenir) et écrite par Jonh Howell, un ancien directeur de l'Overseas Development Institute (ODI : Institut de développement de l’Outre-Mer), suggérait qu'il n'y avait «aucune raison physique, économique ni environnementale» d'empêcher la réinstallation des habitants sur les îles Peros Banhos et Salomon.

Howell indiquait qu'environ 150 familles – un peu moins de 1000 personnes et environ un quart de ceux autorisés à revenir – souhaiteraient revenir. L'éco-tourisme et l'exportation de poissons pourraient fournir des emplois et des revenus. Le coût total de la réinstallation de ces familles, pour le Royaume Uni, serait d'environ 25 millions de livres sterling, précisait le rapport.


Source : Chagos islanders lose battle to return

Article original publié le 22/10/2008

Traduit par Isabelle Rousselot et révisé par Fausto Giudice, Tlaxcala

vendredi 24 octobre 2008

Solidarité avec la lutte du Mouvement indigène de Colombie

par Humberto CHOLANGO

Aux organismes internationaux de droits humains

Aux organisations indigènes d’Abya Yala[1]

Aux citoyens du monde

Tous avec “la minga[2] indigène et populaire pour la résistance” en Colombie

Maintenant que plusieurs peuples de l’Amérique Latine sont en train de développer des processus formidables de changement et qu’ils cherchent à jeter les bases de modèles équitables et démocratiques, des gouvernements persistent à vouloir maintenir des modèles qui sont aujourd’hui balayés par l’histoire, des modèles qui tombent en morceaux de Wall Street à Tokio, en passant par Londres et Paris et les centres économiques les plus importants du capitalisme mondial.

Pour le président de la Colombie, Alvaro Uribe, il n’y a pas de crise financière mondiale. Il ne s’est pas rendu compte que le néolibéralisme ne peut plus être défendu par le président français, ni encore moins par George W. Bush. Personne ne lui a dit que les USA sont en train de perdre la guerre d’invasion en Irak et Afghanistan; pour lui il n’y a que l’antiterrorisme; tous, sauf lui même, sont des terroristes. Tous ceux qui critiquent, qui défendent les droits humains, qui exigent justice et démocratie, tous ceux-là sont des terroristes qu’il faut éliminer sans ménagement.

Les peuples indigènes de Colombie ont initié depuis le 4 octobre dernier le soulèvement national “minga indigène et populaire pour la résistance” en défense et pour la dévolution de leurs territoires ancestraux, et en protestation contre l’initiative législative et administrative lésant les droits des peuples indigènes et l’intégrité de leurs territoires, et qui à travers le TLC (traité de libre-échange) signé avec les USA établirait le marché libre des terres et des ressources naturelles.

La réponse du gouvernement d’Uribe a été l’application génocidaire du terrorisme d’État, contenu dans le Plan Colombie et dans la Sécurité Démocratique imposée et financée par le gouvernement US. Pendant ces mobilisations il y a déjà eu es dizaines de blessés et douze morts – dont des hommes, femmes, des personnes âgées et des enfants -, pour la plupart des dirigeants. Et Uribe les appelle terroristes.

Qui mérite la condamnation internationale? Ceux qui ont décidé se lever dans leurs patelins où ils sont marginalisés par les possesseurs du pouvoir de l’argent et de la politique? Ou ceux qui méconnaissant toute norme légale et éthique, dépensent des milliards pour acheter des armes afin d’assujjettirle peuple colombien?

En tant que Confédération Kichwa de l’Equateur, ECUARUNARI, nous exprimons notre solidarité avec les milliers de frères indigènes ayant proclamé le soulèvement national en défense des droits des peuples indigènes. Nous demandons à l’ONIC (Organisation Nationale Indigène de la Colombie) ne pas abandonner leur lutte, qui est la nôtre. Nous ne prendrons aucun repos pas jusqu’à ce que le néolibéralisme et les impérialistes soient bannis de l’Amérique Latine.

Avec la même énergie nous rejetons et condamnons fortement les actions fascistes de l’État et du gouvernement colombien, et demandons aux instances multilatérales (ONU, OEA, CAN) de droits humains d’accomplir leur objectif de défendre la démocratie et la vie des peuples. En Colombie sont en train de se commettre des actes de génocide et des crimes contre l’humanité exigeant la condamnation mondiale.

Pour le Conseil de Gouvernement
Humberto Cholango



[1] Abya Yala est le nom choisi en 1992 par les nations indigènes d'"Amérique" pour désigner le continent au lieu de le nommer d'après Amerigo Vespucci.
L'expression « Abya Yala » vient de la langue des Kunas, un peuple indigène de Panama et de Colombie qui utilise cette expression pour nommer l'Amérique. Les mots signifient « terre dans sa pleine maturité ». Le leader indigène aymara de Bolivie Takir Mamani a proposé que tous les peuples indigènes des Amériques nomment ainsi leurs terres d'origine, et utilisent cette dénomination dans leurs documents et leurs déclarations orales, arguant que « placer des noms étrangers sur nos villes, nos cités et nos continents équivaut à assujettir notre identité à la volonté de nos envahisseurs et de leurs héritiers. » La proposition de Takir Mamani a reçu un accueil favorable dans divers secteurs.(NdR)

[2] Une minga, également appelée minka (en langue quechua) ou minca ou encore mingaco, est une tradition andine de travail collectif à des fins sociales. D'origine précolombienne, cette tradition met le travail commun au service d'une communauté, d'un village ou d'une famille, à des moments déterminés où un effort important est nécessaire : récoltes agricoles, constructions de bâtiments publics, déménagements.Elle se pratique en particulier au Pérou, en Équateur, en Bolivie et au Chili. Des pratiques équivalentes existent ailleurs : en Haïti on l’appelle koumbit (du français coup de main), aux Comores mranda (du français rendez-moi service), au Maroc tawaza o tawiza.(NdR)




16 septembre 2004 : 60 000 indigènes défilent à Cali au terme d’une marche pour la vie, la justice, la joie, l’autonomie et la liberté.


Source : Solidaridad con la lucha del Movimiento Indígena de Colombia

Article original publié le 16/10/2008

Sur l’auteur

Traduit par Nuria Álvarez Agüí et révisé par Fausto Giudice,
Tlaxcala

jeudi 23 octobre 2008

Une Bolivie digne avance vers sa refondation

Les mouvements sociaux, une fois de plus, écrivent l’histoire
par Alex CONTRERAS BASPINEIRO

C’était hier, à La Paz. Il était 12h55 à la vieille horloge du Palais Législatif. Le Président de la République Evo Morales Ayma ne peut contenir son émotion et pleure, les dirigeants des mouvements sociaux se confondent en une seule étreinte, les milliers de manifestants crient de joie et font ondoyer leurs drapeaux et wiphalas[1], les mineurs font exploser leur dynamite et les paysans font écouter leurs pututus[2]. C’est un jour historique pour la Bolivie, car le Congrès National a approuvé aux deux tiers la convocation du référendum sur la nouvelle Constitution politique de l'État pour le 25 janvier 2009.

"A partir de ce moment, nous commençons tous la campagne pour adopter à cent pour cent la nouvelle Constitution de l'État», déclare le chef de l'Etat devant des milliers et des milliers de personnes qui, après leur marche, ont assuré une veille toute la nuit sur la place Murillo.

Le Président souligne que, grâce à une nouvelle Carta Magna[3], plusieurs avantages seront constitutionnalisés, comme la Rente Dignité[4], l’allocation Juancito Pinto[5] ou la nationalisation des hydrocarbures.

Les autonomies départementales -comme indigènes et municipales- sont garanties et constitutionnalisées et, en un acte de justice, la Bolivie est reconnue comme un État unitaire social de droit, plurinational, communautaire, souverain, interculturel et décentralisé.

Se félicitant de l'engagement et de la lutte des mouvements sociaux, Morales Ayma a déclaré: «La refondation de la Bolivie nous a unis... Je me félicite de la décision de la Centrale Ouvrière Bolivienne (COB) de se joindre à la Coordination Nationale pour le Changement (CONALCAM)."

La marche depuis Caracollo (Oruro) jusqu’à La Paz a été menée par les principaux dirigeants de la COB et de la CONALCAM ; autour de celles-ci plus de 95 organisations sociales de l'ensemble du territoire national ont participé.



Le chemin se fait en marchant

Des milliers et des milliers de Boliviens et Boliviennes sont arrivés hier à La Paz, après avoir marché 190 kilomètres en huit jours, avoir eu faim et soif dans des communautés situées au-dessus de quatre mille mètres d’altitude, avoir dormi exposés aux intempéries dans les hautes terres glaciales et avoir subi une campagne médiatique les diabolisant comme « ennemis » de la démocratie.

Comme s’il s’agissait du réveil d’un géant endormi, les représentants des mouvements sociaux, fiers de leur culture, portant leurs vêtements et accompagnés de leur musique et de leurs traditions, ont reçu sur leur passage non seulement de la nourriture ou des boissons, mais aussi et surtout de la solidarité.

La marche, la plus grande de l’histoire démocratique du pays, en plein centre névralgique de la Bolivie politique, est devenue une fête multiculturelle et multiethnique qui a ébloui les marcheurs comme les observateurs.

Il y a une semaine, aucun homme politique ne montrait d’intérêt à la recherche de solutions concertées. On cherchait une fois de plus la polarisation du pays pour qu’il y ait des affrontements et une division plus grande -mais les pas des marcheurs ont tracé la seule voie possible : le dialogue urgent.

« C'est un grand triomphe pour la Bolivie car ils sont en train de construire un projet qui inclut tout le monde... Ceci n'est pas un projet du gouvernement ou de l'opposition, c’est un projet des Boliviens », a déclaré Raul Lagos, le délégué de l'Organisation des États américains (OEA).

Grâce à une loi spéciale d'interprétation de l'article 233, le Congrès national a décidé de convoquer un référendum constitutionnel à la date du 25 Janvier 2009 et des élections générales en décembre de l'année prochaine.

« Nous autres peuples indigènes, paysans et autochtones ainsi que tous les mouvements sociaux n’allons agresser aucun parlementaire ni aucun citoyen comme l’ont fait les autonomistes par des actions racistes. Nous autres défendons la culture de la vie », a déclaré le chef de la CONALCAM Fidel Surco.

Les marcheurs, représentant les organisations de la campagne et de la ville qui recherchent et appuient le processus de changement, arrivaient de Santa Cruz et Oruro, Tarija et Potosí, Beni et Chuquisaca, Pando et Cochabamba.

Plus de cent articles

La marche difficile mais déterminée des manifestants a obligé l'opposition comme les partis au pouvoir à apprendre à parler, à se débarrasser de leurs intérêts politiques et personnels et à conclure des accords concrets.

La session du Congrès a duré de plus de seize heures d’affilée.

Les positions intransigeantes d’il y a quelques jours, du genre « pas une seule virgule du nouveau projet ne sera modifiée, sauf le chapitre sur l'autonomie » ou « nous n’approuverons pas une Constitution maculée de sang », ont été abndonnées.

Selon le Vice-Président de la République Álvaro García Linera, les articles modifiés sont plus de cent, certains dans la forme, d’autres dans le fond.

"Les forces politiques se sont accordées sur une centaine de corrections à apporter au nouveau texte constitutionnel relatives à des questions électorales, aux autonomies, à la justice communautaire et ordinaire - entre autres", a-t-il dit.

Parmi les thèmes qui ont fait l’objet d’un accord, il y a la question de la terre – qui concerne énormément les secteurs productifs : il a été établi que les résultats du référendum constitutionnel concernant les propriétés de 5 à 10 mille hectares n'auront pas d'incidence sur ceux qui possédaient ces terres avant la consultation -pour autant que ceux-ci remplissent leur rôle économique et social.

En ce qui concerne les autonomies, on est arrivé à un chapitre beaucoup plus complet, consistant et répondant mieux aux attentes des régions de Tarija, Beni, Santa Cruz et Pando.

Dans ces quatre régions autonomes ont été menés des référendums qualifiés d’illégaux.

"La Bolivie a gagné. Ceci couronne un effort de deux années dans notre vie politique ... Nous sommes satisfaits pour plusieurs raisons, pour une étape culminante dans un pays qui a lutté des décennies pour l'inclusion sociale ", a indiqué Garcia Linera.

Bien qu'existent des désaccords de caractère régional, en particulier des parlementaires de Santa Cruz et Chuquisaca, la plupart des quatre groupes politiques (MAS[6], MNR[7], UN[8] et PODEMOS[9]) ont établi un accord qui, en substance, renforce le système démocratique bolivien.



En train de creuser leurs tombes

Devant la force des mouvements sociaux, l'opposition non seulement s’est retrouvée sous pression mais aussi plus faible et, finalement, elle a connu une défaite.

Jusqu'à hier les opposants, déployant une stratégie de communication à travers tous les médias commerciaux, faisaient valoir que « la constitution du MAS ne serait approuvée qu’en passant sur leurs cadavres. »

Aujourd'hui, certains pleurent leur défaite, d'autres encore ne peuvent accepter le coup dur, et la plupart tentent de justifier l'injustifiable.

Le préfète de Chuquisaca, Savina Cuellar, ancienne du MAS, a dit :"Ceux qui ont appuyé le Congrès National sont des traîtres. Nous ne pouvons pas adopter cette Constitution vénézuélienne, nous ferons campagne pour le non ». « Nous n'avons pas été pris en considération... le thème de la compétence dans les autonomies n’a pas été complètement défini », a déclaré le député de l’opposition Paul Klinsky. Le Comité Civique[10] de Santa Cruz a rejeté les accords du Congrès et a déclaré l'état d'urgence. Le chef de PODEMOS, Jorge Quiroga, a admis qu'il y avait des divergences dans son parti.

«Les néolibéraux n’ont plus qu’à creuser leur propre tombe. Le peuple bolivien a maintenant triomphé et nous devons nous organiser et nous préparer à gouverner et à prendre le pouvoir les vingt prochaines années », a déclaré le chef de la COB, Pedro Montes.

Les parlementaires de l'opposition qui autrefois ont mené ce pays à leur guise ont fini par être défaits, les mouvements sociaux qui soutiennent le processus de changement sont sortis renforcés : la Bolivie marche vers sa refondation.

[1] Whiphala : drapeau arc-en-ciel à sept bandes, symbole de l’empire Inca (Wikipedia)

[2] Pututu : trompette faite d’une coquille de conque ou d’une corne d’animal (Wikipedia).

[3] Carta Magna : la nouvelle Constitution.

[4] Rente Dignité : rente viagère de vieillesse accordée à tous les citoyens de plus de 60 ans.

[5] Allocation Juancito Pinto : L’allocation Juancito Pinto est censée permettre à des centaines de milliers d’écoliers de recevoir 20 euros annuels -un chiffre considérable en Bolivie- grâce aux ressources provenant de la nationalisation des hydrocarbures. (RISAL)

[6] MAS : Mouvement vers le Socialisme (Wikipedia)

[7] MNR : Mouvement Nationaliste Révolutionnaire (Wikipedia)

[8] UN : Front d’Unité Nationale (Wikipedia)

[9] PODEMOS : Pouvoir Démocratique Social, l’acronyme signifiant « nous pouvons » (Wikipedia)

[10] Comité Civique de Santa Cruz : Regroupant les organisations sociales, syndicales et patronales d’un département, les comités civiques ont pris une importance particulière sur la scène politique de certaines régions boliviennes, notamment à Tarija et Santa Cruz. Dans ce dernier département, ce sont les organisations patronales qui sont majoritaires, le comité civique étant considéré par certains de ses membres comme le « gouvernement moral » et légitime des Cruceños (habitants de Santa Cruz).Le Comité Civique de Santa Cruz est d’une certaine manière l’avant-garde de l’opposition au gouvernement d’Evo Morales et un fervent partisan de l’autonomie des départements (RISAL)


Evo Morales reçoit une bénédiction d'un prêtre guérisseur indigène durant une cérémonie à Santa cruz le 23 octobre 2008. 15 000 personnes venues de 18 pays de 3 continents y sont rassemblées pour une rencontre internationale de solidarité avec la Bolivie et Evo Morales qui doit durer 3 jours.




Le vice-Président Alvaro Garcia Linera danse avec une Équatorienne le 23 octobre à Santa Cruz.

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Source : Bolivia digna avanza hacia su refundación

Article original publié le 21/10/2008

Sur l’auteur

Photos Reuters Pictures

Traduit par Thierry Pignolet, révisé par Fausto Giudice,
Tlaxcala

Versione italiana

mercredi 22 octobre 2008

Tractatus Logico Palestinicus*

par Gilad ATZMON


1 “Ce qui peut de toute façon être dit peut l’être clairement, et sur ce dont on ne peut parler, il faut garder le silence.” (Ludwig Wittgenstein, 1918)

1.1 L’humanisme et l’éthique sont des finalités dignes qu’on combatte pour elles.

1.2 La politique et le discours politique occidentaux (par ailleurs) sont préoccupés de pouvoir et d’hégémonie.

1.3 L’ humanisme et l’éthique sont donc étrangers au discours politique occidental et inversement.

2 La lutte de libération des Palestiniens est fondée sur des arguments humanistes et éthiques puisqu’elle est basée sur un droit moral, à savoir le “droit au retour” et la “libération”.

2.1 Puisque la lutte de libération des Palestiniens est une cause humaniste, les politiciens et le discours politique occidentaux sont étrangers à la lutte des Palestiniens.

2.11 En conséquence, la politique occidentale, qu’elle soit de gauche, de droite ou du centre, a été incapable de desservir le people palestinien et sa lutte pendant les décennies d’abus sionistes.

2.12 C’est malheureusement ainsi qu’il faut lire, en vérité, l’échec colossal de la gauche à aider le people palestinien. Étant un discours politique, la gauche est préoccupée de pouvoir et d'hégémonie. En conséquence, elle a exploité le discours sur les Palestiniens afin de maintenir sa propre pertinence (ou plutôt non-pertinence) à l’intérieur de son univers imaginaire.

2.121 Les Palestiniens ont compris la leçon. Leur mouvement de libération a mûri et a abandonné le rêve utopique conduisant dans une impasse et étranger à leur cause nationale.

2.1211 Puisque la lutte des Palestiniens est une lutte orientée géographiquement, ethnique et nationale, les idéologies prolétariennes et cosmopolites feraient mieux de se réviser pour s’adapter.

2.122 Il faut quand même dire la vérité : les militants de gauche occidentaux ont été très efficaces pour produire une culture de solidarité, que ce soit des badges, des foulards o des affiches, qu’ils ont diffusé entre eux et aux parents proches.


2.123 Et pourtant, tous ces badges, ces affiches, ces tracts n’ont pas sauvé un seul enfant palestinien des chenilles d’un tank israélien.

2.2 Le people palestinien devra se libérer par ses propres moyens.

2.21 Et les militants de la solidarité feraient mieux d’apprendre à écouter.

3 Puisque « l’humanisme et l’éthique valent qu’on se batte pour eux » (1.1),

3.1 et que la lutte des Palestiniens est une cause humaine (2.1),

3.2 Nous devons soutenir les Palestiniens tels qu’ils sont et leur choix (démocratique).

4 Il y a une difficulté logée au coeur du discours de solidarité avec les Palestiniens qui doit être affrontée :

Sionisme (l’idéologie), judaïsme (la religion), judéité (identité) et Juifs (les gens) sont des termes étroitement liés, qui prêtent à confusion. En conséquence, toute forme de militantisme propalestinien est contrainte par la peur de se voir accusée de soutenir des idées susceptibles d’être considérées par certains comme du racisme.

4.01 En même temps, la grande majorité des Palestiniens e des militants de la solidarité réalisent qu’Israël, les lobbys juifs, les groupes de pression juifs et toutes autres formes de militantisme tribal juif sont souvent difficiles à distinguer.

4.1 La question qui vient à l’esprit est : comment pouvons-nous dire ce que nous croyons être la vérité et continuer à nous considérer comme humanistes ?

4.12Comment faire pour parler ouvertement de l’État juif, du lobbying juif, du judaïsme et de la judéité tout en gardant une position humaniste et éthique, antiraciste ?

4.2 La réponse est simple. Nous ne pouvons y arriver que si nous parvenons à démanteler catégoriquement toute trace d’argumentation raciale. Nous devons nous abstenir de parler des gens quand nous nous en prenons au sionisme, au tribalisme politique juif et à la judéité. Nous devons l’attaquer en tant qu’idéologie et que credo dogmatique.

4.3 Nous sommes en droit de le faire en tant qu’humanistes pour la simple raison que toue forme de politique tribale juive et racialement orientée et exclusiviste. Nous sommes en droit à nous référer au tribalisme politique juif comme reflet d’une vision du monde non humaniste et anti-universaliste.


4.4 Par conséquent, le démantèlement de l’idéologie et du tribalisme politique juifs est une tâche humaniste.

4.5 Combattre la politique tribale juive est un acte humaniste et éthique car il aspire à la paix, à l’universalisme et à l’inclusion (en opposition à la guerre, au tribalisme et à l’exclusion).

5 Ce qui peut de toute façon être dit peut l’être clairement, et sur ce dont on ne peut parler, il faut garder le silence.”

* L’auteur fait allusion au titre donné par ses traducteurs anglais à la Logisch-Philosophische Abhandlung de Ludwig Wittgenstein, parue en 1921 : Tractatus logico-philosophicus (Traité logico-philosophique), en référence au Tractatus Theologico-Politicus de Baruch Spinoza; (NdT)



Source : Tractatus Logico Palestinicus
Article original publié le 21/10/2008
Sur l’auteur
Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala. Cette traduction est libre de reproduction, à condition d'en respecter l’intégrité et d’en mentionner l’auteur, le traducteur, le réviseur et la source.
Deutsche Fassung

mardi 21 octobre 2008

La guerre pour l'Ossétie du Sud

Petite leçon d'histoire pour les ignorants et ceux qui croient tout savoir
par Daniele Scalea

La Géorgie : de Jason à Gamsakhourdia
La Géorgie a fait partie de la Russie jusqu'en 1991 où, renaissant des cendres de l'Union Soviétique, elle est devenue une nation indépendante. A l'origine, dans cette zone du Caucase occidental, différents pays coexistaient, dont le plus important était le Royaume de Colchide donnant sur la mer Noire et bien connu des Grecs anciens : en effet, selon la mythologie, c'est ici que Jason et les Argonautes trouvèrent la Toison d'or avec l'aide de Médée, princesse du pays.
D'autre part, la partie la plus montagneuse à l'est et au sud de la Géorgie appartenait au Royaume de Kartli (connu des Grecs et des Romains sous le nom de “Iberia”).
Ces deux royaumes ont été les premiers à adopter le christianisme comme religion officielle, dès le début du 4ème siècle. Après avoir été conquise par Rome en 66 avant JC et dirigée d'abord par les Romains puis par les Byzantins pendant presque un demi-millénaire, la Géorgie d'aujourd'hui était alors un champ de bataille durant les guerres entre les Byzantins et les Perses : cette situation a eu un rôle dans la désintégration politique du pays qui, au 7ème siècle, devint une proie facile pour l'expansion arabe. Au 11ème siècle, le pays réussit à se débarrasser du pouvoir arabe et, pour la première fois, il se retrouva uni en un seul royaume, la Géorgie, et commença à s'étendre dans tout le Caucase en repoussant les Turcs seldjoukides.
Déjà au 13ème siècle, la Géorgie capitula trop rapidement devant la progression implacable des Mongols et elle commença à se morceler en plusieurs petits États, dont certains furent plus tard annexés à l'Empire Ottoman tandis que d'autres furent rattachés à l'Empire Perse.
Ce n'est qu'à partir de 1762 que le pays retrouva son indépendance : la partie orientale fut réunifiée sous Héraclius (Irakli) II dans le Royaume de Kartlie-Kakhétie.
En 1793, ce royaume conclut un Traité d'amitié avec l'empire russe, et devient alors un protectorat de la Russie, le Tsar étant reconnu comme le dirigeant légitime de la Géorgie Orientale (laquelle conserva cependant son autonomie dans sa politique intérieure).En 1783 ce royaume signa avec l’Empire russe le Traité de Gueorguievsk, par lequel ils e mettait sous la protection du tsar, qui était reconnu comme souverain légitime de la Géorgie orientale (à laquelle était néanmoins garantie une autonomie interne).
Le 22 décembre 1800, à la demande du roi de Géorgie, George XII, le Tsar Paul 1er de Russie signe l'annexion volontaire du Royaume de Kartlie-Kakhétie à la Russie.
Durant l'été 1805, malgré l'aristocratie locale, hostile à l'annexion, l'armée russe remporte une victoire décisive en repoussant une attaque des Perses (la bataille de la rivière Askerani). Cinq ans plus tard, les troupes du Tsar Alexandre 1er englobent également le royaume d'Iméréthie, à l'ouest de la Géorgie.
Durant les décennies suivantes, les Russes mènent de nombreuses guerres contre les Turcs et les Perses et étendent considérablement les frontières de la Géorgie avec la conquête de l'Adjarie, des villes de Lomse et de Poti, et de l'Abkhazie.
Après la Révolution russe de 1917 et l'arrivée au pouvoir à Petrograd des sociaux-démocrates bolcheviks, de nombreuses régions de l'Empire dirigées par les menchéviks, déclarent leur indépendance : la Finlande, les États baltes, la Biélorussie, l'Ukraine et les pays transcaucasiens qui de ce fait, sans oublier les nombreuses et provisoires formations politiques créées par les “blancs”, les contre-révolutionnaires tsaristes.
Peu de ces déclarations d'indépendance étaient motivées par un véritable esprit national présent au niveau populaire, esprit national qui était d’ailleurs généralement absent de la culture des classes dirigeantes locales : de fait, après la Révolution de février, le corps de l'ancien Empire russe n’avait pas été touché.
Ce qui l’a fait exploser et éclater en morceaux fut la violente prise de pouvoir par les bolcheviks qui occupèrent la capitale, Petrograd, en novembre 1917 et qui, début 1918, firent dissoudre de force l'Assemblée constituante qui venait d'être élue, puisque leurs représentants s’y trouvaient en nette minorité.
C'est alors que ces forces politiques, ayant perdu le pouvoir en Russie, prirent leur revanche contre les bolcheviks en proclamant l'indépendance des régions périphériques qu'elles avaient sous leur contrôle.
De ces gouvernements séparatistes éphémères, celui de la Géorgie fut considéré comme le plus stable et le plus efficace du point de vue administratif, même si la “République Démocratique de Géorgie” n'était en fait qu'un protectorat de la Grande-Bretagne (qui avait pris des mesures militaires contre les bolcheviks, comme l’avaient fait aussi les autres puissances de l'Entente). Durant sa courte existence, le gouvernement menchévik géorgien se démarqua également par son agressivité : il entra d'abord en guerre contre l’Arménie pour la conquête de certains territoires ethniquement mixtes, puis il attaqua l'armée blanche de Moïsseïev et de Denikine afin d'étendre les frontières de la Géorgie vers Sotchi (qui est aujourd'hui une station balnéaire russe sur les bords de la Mer Noire). Ce qui ne fit que les affaiblir pour la confrontation finale avec les bolcheviks qui, entre-temps, avaient mis fin à la guerre civile et s'étaient attelés à regagner les régions séparatistes : en février 1921, l'Armée Rouge entra en Géorgie et prit, en quelques jours, le contrôle des Mencheviks et de la république pro-britannique, incorporant le pays dans l'URSS naissante (d'abord dans la République transcaucasienne soviétique puis, en 1936, dans la République Socialiste Soviétique de Géorgie, une des trois RSS).
Quand le dirigeant des bolcheviks et le Président de la Russie, Vladimir Ilitch Oulianov (plus connus sous le nom de Lénine) meurt après une longue maladie, c'est un Géorgien qui lui succède : Joseph Vissarionovitch Djougachvili, né à Tbillissi (alors Tiflis), qui restera dans l'histoire sous le nom de Staline, l'homme qui tint les rênes du pouvoir de la Russie pendant plus de 30 ans.
Un demi-siècle plus tard, l'incroyable et courte histoire de l'Union Soviétique prit fin.
La Géorgie déclara son indépendance le 9 avril 1991 et son premier Président (élu en 1990 quand le pays faisait encore partie de l'URSS) fut Zviad Gamsakhourdia, un ancien et célèbre dissident pendant l'époque communiste.
L'indépendance proclamée avec le slogan “la Géorgie aux Géorgiens” ne pouvait que préoccuper les nombreuses minorités ethniques vivant autour de l'entité administrative de Tbilissi, que Gamsakhourdia et ses sympathisants nationalistes considéraient à tort, comme un bloc national monolithique. En particulier, les régions d'Adjarie et d'Abkhazie (qui furent annexées à la Géorgie par les Russes qui les avaient soustraites aux Turcs) ainsi que l'Ossétie du Sud (dont les habitants sont semblables à ceux de la province russe de l'Ossétie du Nord) réclamèrent le même droit à l'indépendance que Tbilissi (et sa mise en oeuvre immédiate). Déjà en 1989, l'Ossétie du Sud, une province autonome de la République Socialiste Soviétique de Géorgie, fut la scène de violents combats opposant les Ossètes, loyaux à Moscou, et les Géorgiens, nationalistes.
Le Conseil Régional d'Ossétie décida de déclarer la sécession avec la République Socialiste Soviétique de Géorgie mais celle-ci riposta en levant le statut d'autonomie de l'Ossétie, ravivant ainsi les combats.
Ces récents conflits fratricides en Géorgie n'étaient pas qu'interethniques mais aussi politiques : le 6 janvier 1992, le gouvernement dirigé par Gamsakhourdia fut renversé par un coup d'État sanglant et qui ne fut pas du tout rapide, puisqu’il durait déjà depuis presque deux semaines.
Gamsakhourdia trouva refuge en Tchétchénie (après un court séjour en Arménie) sous le gouvernement rebelle du Général Djokhar Moussaïevitch Doudaïev. Les meneurs du coup d'État nommèrent un nouveau président, en la personne de l’ancien Ministre des Affaires étrangères Soviétique au temps de Gorbatchev, Édouard Chevardnadze. Les combats entre les sympathisants du nouveau Président et les partisans du précédent durèrent pendant deux ans. Puis en septembre 1993, une guerre soudaine éclata entre l'armée géorgienne et les Abkhazes qui refusent, encore aujourd'hui, de se soumettre à l'autorité de Tbilissi, étant donné qu'ils représentent la majorité dans la partie nord-ouest du pays. Les combats furent terribles et les Abkhazes réussirent à repousser les troupes de Tbilissi et à chasser des milliers de Géorgiens qui vivaient en Abkhazie. Gamsakhourdia sauta sur l'occasion et, dès la fin septembre 1993, il retourna dans son pays entraînant ses partisans armés à tenter une révolte. L’insurrection semblait en bonne voie mais Chevardnadze, en autorisant la Géorgie à rejoindre la Communauté des États Indépendants, reçut le soutien des pays voisins, et surtout de la Russie qui lui fournit des hommes et des armes : dès le mois de novembre, les rebelles étaient vaincus et le mois suivant, leur dirigeant, Gamsakhourdia, mourut dans des circonstances qui n'ont jamais vraiment été élucidées.
Pendant ce temps, la longue période de troubles et de combats fratricides avait coûté très cher à la toute nouvelle République de Géorgie : comme l'Abkhazie, l'Ossétie du Sud avait réussit à obtenir son indépendance. Aussi bizarre que cela puisse paraître, de nombreux séparatistes tchétchènes ont combattu pour la liberté des Abkhazes tandis que l'aide des Russes avait été cruciale pour les Ossètes du Sud.

La “Révolution des Roses” : Saakachvili, Président de Géorgie
Au cours de la décennie qui suivit, le Président Chevardnadze reçut deux fois la reconnaissance de son peuple, en gagnant les élections de 1995 et de 2000. Les élections qui eurent lieu le 2 novembre 2003, et qui furent prétendument truquées selon les médias et les organisations pro-US, furent le détonateur d'un nouveau remaniement politique violent, dénommé “Révolution des Roses”. Chevardnadze a souvent répété que ceux qui voulaient et ont mené ce coup d'État, étaient les USA ; et, inutile de dire que l’ex-Président géorgien ne peut pas être suspecté d'anti-américanisme. Il suffit par exemple de rappeler que, lorsqu'il était Ministre des Affaires étrangères de Russie, au cours d’une réunion avec les USA, il demanda au Président usaméricain de l'époque, George H. W. Bush, quelle politique étrangère il suggérait à l’URSS, car il souhaitait abandonner toute ambition de défense des enjeux nationaux. Cependant, en tant que Président de la Géorgie, Chevardnadze s'avéra être trop indépendant et, surtout, trop enclin à garder de bonnes relations avec Moscou.
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L'explosion du conflit
La guerre

lundi 20 octobre 2008

Arrêtons les massacres en Colombie ! 19 indigènes ont été assassinés ces 15 derniers jours

par Miguel PALACÍN QUISPE

La Coordination Andine des Organisations Indigènes, CAOI, alerte la communauté internationale que l’État colombien, administré par le gouvernement d’Alvaro Uribe, est responsable d’un génocide d’indigènes. La répression indiscriminée lancée contre les peuples indigènes colombiens a déjà fait 19 morts en seulement quinze jours.

Articulés dans l’Organisation Nationael Indigène de Colombie (ONIC), les peuples indigènes de ce pays sont en train de développer la Minga[1] de Résistance Indigène et Populaire, pour attirer l’attention du monde sur la violation de leurs droits. Ils lancent “un appel au monde pour que leurs droits soient reconnus non seulement de manière formelle et qu’ils deviennent une réalité”. Le gouvernement répond par la répression et ne les protège pas des groupes paramilitaires.

La Minga de Résistance est une réponse à ce génocide et à cette violation de leurs droits. Et elle a comme activité centrale les mobilisations pacifiques des peuples indigènes dans tout le pays. Le gouvernement Uribe a répondu par la répression, qui fait partie de la criminalisation des revendications indigène s: des incursions violentes dans leurs territoires, stigmatisation de leurs cadres comme terroristes, détentions, tortures, assassinats, disparitions et déplacements forcés.

Ce qui a été déjà avéré et dénoncé par le Tribunal Permanent des Peuples, lequel après sa session sur le génocide d’indigènes tenue dans la réserve[2] indigène de Kankuamo, dans la Sierra Nevada de Santa Marta, Colombie, les 18 et 19 juillet 2008, a émis une Accusation disant textuellement:

“Accuser l’État colombien et le gouvernement d’Alvaro Uribe Vélez, d’ avoir commis de graves violations des droits collectifs et individuels des peuples indigènes de la Colombie, se concrétisant, dans la mise en oeuvre de politiques d’extermination, génocide, ethnocide et déplacement des peuples indigènes”.

La violation systématique des droits indigènes est mise en œuvre pour favoriser l’exploitation de leurs territoires afin de les offrir aux multinationales minières. On constate une fois de plus que les États uninationaux sont au service des intérêts des entreprises transnationales.

Ce qui est plus grave est qu’encore plus de répression est annoncée. NOUS AVERTISSONS LE MONDE QU’IL Y A UN MASSACRE EN GESTATION EN COLOMBIE ET NOUS DEVONS L’ARRÊTER.

La CAOI demande au président colombien Álvaro Uribe la fin de ces actes criminels contre les peuples indigènes. Nous appelons aussi les organisations indigènes du continent, les organismes de droits humains, les forums internationaux (Communauté Andine, UNASUR, OEA, ONU), à se prononcer imédiatement pour arrêter le génocide d’indigènes en Colombie, et à signaler qu’il est de la responsabilité du gouvernement colombien de protéger les droits de tous.

[1] Une minga, également appelée minka (en langue quechua) ou minca ou encore mingaco, est une tradition andine de travail collectif à des fins sociales. D'origine précolombienne, cette tradition met le travail commun au service d'une communauté, d'un village ou d'une famille, à des moments déterminés où un effort important est nécessaire : récoltes agricoles, constructions de bâtiments publics, déménagements. Elle se pratique en particulier au Pérou, en Équateur, en Bolivie et au Chili. Des pratiques équivalentes existent ailleurs : en Haïti on l’appelle koumbit (du français coup de main), aux Comores mranda (du français rendez-moi service), au Maroc tawaza o tawiza.(NdR)

[2] Le terme resguardo désigne un territoire indigène dont les habitants sont les propriétaires collectifs, reconnus par l’État, dans les anciennes colonies espagnoles des Amériques ; (NdR)



Source : DETENGAMOS EL GENOCIDIO EN COLOMBIA

Article original publié le 14/10/2008

Sur l’auteur

Traduit par Nuria Álvarez Agüí, révisé par Fausto Giudice, Tlaxcala