vendredi 30 mars 2012

Tunis, 30 mars 2012: sit-in des familles de disparus en mer devant l'ambassade d'Italie

Des familles de jeunes Tunisiens disparus en mer entre la Tunisie et l'Italie en mars 2011, accompagnées de nombreux amis tunisiens et italiens, se sont rassemblées ce matin 30 mars devant l'ambassade d'Italie à Tunis pour crier la question qu'elles posent depuis un an :"Où sont nos enfants?" Après plusieurs heures d'attente, une délégation a été reçue par une secrétaire administrative qui a prétendu que l'ambassadeur italien était absent de Tunis. Parallèlement, une manifestation avait lieu devant l'ambassade tunisienne à Rome(ascoltate qui).

Regardez les vidéos ici
 
 "Ouïn ouledna ?": Où sont nos enfants ?
 "D'une rive à l'autre : des vies qui comptent"
 "La Terre est à tout le monde"


"Nous voulons nos enfants, SVP" 

Une longue attente sans résultat

jeudi 29 mars 2012

Mali: Sempiternelle ritournelle ?

par Koro Traoré , 26/3/2012

En soixante-deux ans d’indépendance, le Mali a été dirigé pendant trente-trois ans par des militaires, 23 ans de dictature musclée sous Moussa Traoré (1968-1991) et dix ans de bureaucratie militaire laxiste sous Amadou Toumani Touré (2002-2012).
Le nouveau coup de force des jeunes officiers, le 22 mars 2012, à quarante (40) jours du 1er tour de l’élection présidentielle de 2012 et à quatre jours du 21ème anniversaire de l’éviction de Moussa Traoré, paraît devoir plonger le pays dans une nouvelle zone de turbulence.

Proclamation des putschistes à la télévision malienne le 22 mars 2012

Comme si trente-cinq ans après le meurtre symbolique du père fondateur de la nation, Modibo Keita, précisément par des militaires, le Mali paraît happé par une nouvelle spirale de violence, lourde d’incertitudes, comme si ce pays était voué à une errance faute d’avoir expié cet acte sacrilège.

Héritier d’un triple empire, l’Empire du Ghana, l’Empire du Mali et l’Empire Songhaï, foyer historique de l’Empire Mandingue qui forgea sous Soundiata Keita, la Charte du Mandé, lointaine préfiguration des règles de bonne gouvernance moderne, le Mali vit la nouvelle irruption touarègue comme une réminiscence cauchemardesque de l’invasion de 1076 qui vit la désintégration de l’Empire Songhaï d’Askia Mohammad, sous le coup de boutoir des forces berbères déferlant d'Afrique du Nord pour islamiser l’Afrique occidentale.


Contrecoup de l’élimination de Mouammar Kadhafi, le Mali subit de plein fouet les effets du reflux massif des groupes armés Touareg de Libye. Recrutés pour sécuriser le sud de la Libye et soutenir la croissance économique libyenne, en véritables soldats laboureurs dans l’optique de Kadhafi, leur reflux massif vers leur ancienne zone de déploiement au Mali et au Niger, a provoqué une modification de la donne régionale.

Anciens vigiles de l’empire islamique, dont ils constituaient avant terme les forces de déploiement rapide, les Touaregs, littéralement en arabe, «Al- Tawareq-Les urgences» caressent le projet de détacher du Mali, le territoire de l’Azawad, dans le nord du pays.


Géographiquement, à des milliers de kilomètres de la capitale malienne, Bamako, en concurrence avec Al-Qaeda au Maghreb islamique (AQMI), le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) a développé à Ménaka, Gao et Tombouctou, une action en vue de réunifier, sous son égide, l'ensemble des populations azawadies dans toutes leur composantes: Songhay, Touareg, Arabes, Peuhls, afin de réussir l'Unité du Peuple de l'Azawad.


Jouant de l’effet de surprise, visant tout à la fois à crédibiliser ses revendications, à impressionner la population, Ansar Eddine (soldats de la religion) ont infligé une série de revers militaires aux troupes gouvernementales, fragilisant considérablement le pouvoir central, en révélant au grand jour son impéritie.


La première alerte aura été l’humiliante défaite d’Aguelhok, où la base de l‘armée est tombée le 24 janvier 2012, faute de munitions. Galvanisés par ce premier succès inattendu, Ansar Ed Edine enfoncera le clou en portant une estocade stratégique à Tessalit, lieu d’une bataille décisive, dans une ville stratégique, proche de la frontière algérienne et dotée d'une base et d'un aérodrome militaire.


Trois unités de l’armée ont dû battre en retraite en Algérie, le 4 mars, laissant le contrôle de la base et de l'aérodrome aux mains du MNLA, laissant sur le terrain un fort contingent de tués et blessés, sans compter les prisonniers et les déserteurs.


En deux mois de combats, l'armée malienne a perdu le contrôle de la plus grande partie de l'Azawad, avec des pertes de militaires tués, capturés ou déserteurs estimées à au moins un millier d'hommes.


Se superposant aux camouflets successifs infligés par la France et la Mauritanie dans leur exercice du droit de poursuite des combattants d’AQMI sur le territoire malien, la perte du camp militaire d’Amachach, le 10 mars 2012, dans la région de Kidal, humiliation suprême, a installé un climat de méfiance jusqu’au plus haut niveau de l'armée malienne.


Le général Gabriel Poudiougou, chef d’état-major général des armées, ivre de colère face au rapatriement par l’Algérie, le 16 mars dernier, de plus de 100 militaires maliens à l’aéroport de Bamako, a ordonné le retour sur le champ des combattants sur le front de GAO, les menaçant du peloton d’exécution devant ce deuxième rapatriement de militaires maliens par l’Algérie depuis janvier.


La situation en février 2012
Les combats ont provoqué l’exode de déjà près de 195.000 personnes depuis la mi-janvier 2012, selon l'OCHA, le Bureau de coordination des Nations unies pour les affaires humanitaires, accentuant la crise alimentaire qui frappe près de trois millions de Maliens du fait de la sécheresse prolongée dans le nord du pays.

Face aux revers successifs de l’armée, la crise politique et sociale qui se profilait et menaçait d’emporter le pays, un groupe d’intellectuels conduit par la prestigieuse militante Aminata Traoré, ancien ministre de la Culture, a donné de la voix proclamant leur opposition au démembrement du Mali, dénonçant au passage la démoralisation des combattants et leur démotivation (
lire la Déclaration d’intellectuels, hommes et femmes de culture sur la rébellion au nord du Mali ci-dessous).

Latent depuis la décennie 1990, le conflit entre le Nord et le Sud du Mali s’est exacerbé avec l’effondrement de la Libye et son passage, par une invraisemblable légèreté occidentale, sous gouvernance islamique avec l’intervention de l’Otan.


Une exacerbation amplifiée par la volonté prêtée à un ancien dirigeant touareg Iyad Ag Ghali de vouloir instaurer la Charia au Mali et surtout le laxisme du président Amadou Toumani Touré, que ses détracteurs accusent d’avoir utilisé des Touaregs de Libye pour contrer la rébellion du nord du Mali, suscitant la méfiance des officiers de grades intermédiaires.


L’opposition malienne reprochera à ATT son népotisme, son corporatisme, sa gestion laxiste du pouvoir d’Etat, la gabegie de son administration agrémentée de corruption. Celui qui passait pour l’homme de la relève en phase de transition démocratique en a payé le prix. Déposé par ses frères d’armes de la même manière qu’il avait procédé avec son prédécesseur Moussa Traoré.
Amadou Toumani Touré, dit ATT
En contradiction avec son rôle premier, Amadou Toumani Touré, à l’époque colonel dans l’armée, avait en effet été l’instrument décisif du premier printemps africain en prenant la tête d’un Conseil de transition pour le salut du peuple qui se retira sagement au bout d’un peu plus d’un an, au profit des civils et d’élections pluralistes.

Sombre présage, le coup d’Etat de ce quarteron de sous-officiers du camp militaire de Kati, à 15 km de Bamako, s’est surtout traduit par des pillages dans les ministères et les commerces privés.


Face au double défi représenté par le réveil de la révolte touareg, encadrée notamment par le  Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et l’activisme des katibas d’AQMI (Al-Qaïda au Maghreb islamique), le Mali risque fort d’en sortir très affaibli, confronté à la progression quasi quotidienne de l’offensive touareg dans le Nord.

Une sanctuarisation d’AQMI dans une région saharo-sahélienne dont la chute de Kadhafi a accentué la déstabilisation, amplifiée de surcroît par la circulation d’un arsenal consistant, entraînerait un bouleversement géostratégique de la zone aux confins de six pays (Algérie, Libye, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal) de l’ancienne Afrique occidentale francophone.

Près de quarante partis politiques se préparaient à se disputer le suffrage des Maliens, pays au nationalisme chatouilleux, partisan d‘un panafricanisme résolu et d’un non alignement revendiqué et assumé, affligé toutefois d’un parlementarisme hérité des pratiques corrosives de la défunte IIIème République française.

Classé parmi les pays les moins avancés de la planète, le Mali s’enorgueillissait en revanche d’une expérience démocratique, très imparfaite mais réelle, inaugurée en mars 1991 avec le renversement du régime du général Moussa Traoré.

Face à un monde arabe en ébullition, une Europe en crise systémique, faute d’une refonte drastique du système politique malien visant à l’instauration d’un pouvoir exécutif fort, avec de solides contrepouvoirs, à défaut d’un sursaut moral, le Mali risque de plonger dans une longue crise de langueur.


Crise à tous égards inopportunes ; alors qu’il a, paradoxalement, vocation à constituer, de par son histoire et sa configuration géographique, l’épicentre d’un nouvel ensemble confédéral, antidote à la balkanisation de l’Afrique et barrage contre les ingérences occidentales et de leurs alliés pétro monarchiques, tant l’Arabie saoudite par ses achats massifs de terres arables que les autres émirats dont le vecteur de pénétration est le salafisme sous couvert de finance islamique.


Effet d’endoctrinement, d’embrigadement, d’entrainement par émulation, de mimétisme, de zèle prosélyte ou de lubrification des rapports ? Quoiqu’il en soit, trois des principaux dirigeants de la rébellion proviennent du corps diplomatique malien ayant servi dans les monarchies pétrolières, conséquence de la stratégie erratique occidentale et de l’instrumentalisation de la religion musulmane à des fins politiques et de l’impunité pétro-monarchique de la part des pays occidentaux.


Un an après l’intervention militaire occidentale contre la Libye, l’onde de choc libyenne ne cesse de faire sentir ses effets avec la déstabilisation du pré-carré africain de la France, la contestation  de la dynastie Wade au Sénégal et la prolifération islamiste dans la zone sahélienne.


En ces heures périlleuses, il est à espérer que le coup de poker des putschistes fasse l’effet d‘un électrochoc à l’effet de réveiller la conscience civique des Maliens et à les inciter, les militaires, à la défense de la Patrie, et, les civils à la défense de la République et de la Démocratie.


Enrôler les islamistes d’Al Qaïda pour combattre l’athéisme de l’Union soviétique, avant de mener une guerre décennale contre le terrorisme de leur ancien allié d’Al Qaïda, pour finir par faire intervenir enfin l’Otan pour instaurer la charia en Libye, …….on aurait rêvé meilleure perspicacité de la part d’un hémisphère qui se réclame de l’intelligence athénienne, de l’ordre romain et du rationalisme cartésien français.


Un peu d‘intégrité et de perspicacité auraient pu épargner au Mali une nouvelle épreuve, dans ces circonstances-là, de même qu’un zeste de sagesse africaine aurait fait, sans nulle doute, un peu de bien à l’humanité.

Déclaration d’intellectuels, hommes et femmes de culture sur la rébellion au nord du Mali
État des lieux
Comment comprendre la rébellion armée qui, aujourd’hui, endeuille le Mali et condamne des dizaines de milliers d’innocentes et d’innocents à l’insécurité et au déplacement forcé, lorsqu’on ne veut pas s’en tenir au schéma réducteur du conflit ethnique ?
La rébellion qui a débuté le 17 janvier 2012 crée dans notre pays une situation de guerre civile.
L’heure est grave : l’intégrité du territoire national et la cohésion sociale sont aujourd’hui menacées.
L’honnêteté intellectuelle et la rigueur qu’exige la gravité de la situation actuelle du Mali imposent de lire cette rébellion à la lumière du système mondial et de ses crises.
Les réformes structurelles mises en œuvre à partir de la décennie 80 en vue de corriger les dysfonctionnements du modèle néolibéral, n’ont pas atteint les objectifs visés en terme d’amélioration des conditions de vie des populations, notamment l’accès à l’alimentation, l’eau, l’éducation, la santé et l’énergie domestique. Ce constat, qui est valable pour l’ensemble du pays, revêt des conséquences particulières au Nord.
Enjeux
Le Nord Mali se caractérise par l’extrême complexité des enjeux géopolitiques, économiques et stratégiques, sans la compréhension desquels aucune paix durable n’y est envisageable.
Le septentrion malien a souvent été le théâtre de soulèvements d’une partie de la population qui revendique son autonomie par la voie des armes. Tous les régimes, coloniaux et postcoloniaux ont été confrontés à cette situation. De l’indépendance à ce jour, les réponses de l’Etat, qui ont été à la fois militaires, politiques et socio-économiques, n’ont pas pu y instaurer la paix sur une base durable.
La mauvaise gestion, le clientélisme et la corruption que l’on relève dans la gestion des affaires publiques, exacerbent les frustrations et le sentiment d’exclusion à l’échelle du pays sans pour autant justifier la violence armée dans les autres régions.
Par ailleurs, la manière de gérer la libération des otages occidentaux a conforté AQMI dans la création au Mali d’un sanctuaire en liaison avec le terrorisme international.
Nous sommes dans un processus programmé de désintégration de l’Etat et de cristallisation des identités ethniques et régionales. De ce point de vue, nous questionnons même la genèse de l’appellation « régions du Nord ».
N’y a-t-il pas une volonté d’affaiblir des Etats de la CEDEAO et l’Organisation elle-même ?
N’allons-nous pas vers une résurgence du vieux projet de l’Organisation des Etats Riverains du Sahara (OERS) ?
Après le découpage du Soudan, nous sommes en droit de nous interroger sur l’intention des pays de l’OTAN de procéder à une nouvelle balkanisation de l’Afrique. Ne sommes-nous pas de fait en présence d’un processus de dépossession des ressources agricoles et minières africaines, qui constituent aujourd’hui une partie importante des réserves mondiales pour la relance de la croissance économique globale ?
De l’approche globale que nous privilégions, il ressort que l’issue à cette guerre fratricide récurrente n’est ni militaire ni financière mais politique, économique, sociale, culturelle et diplomatique.
Face à cette situation, nous, intellectuels, hommes et femmes de culture du Mali, signataires de ce document déclarons que:
− L’intégrité du territoire, l’unité nationale et la cohésion sociale du Mali sont des acquis sacrés.
− Le septentrion n’est pas une planète à part, mais bel et bien une région du Mali, particulièrement vulnérable, qui n’en a pas moins subi les politiques néolibérales qui ont aggravé les inégalités, les injustices, la corruption et l’impunité. De Kayes à Kidal, les Maliens paient cher pour le dépérissement de l’Etat que nous voulons plus responsable, comptable et souverain.
− La Paix véritable et durable dans le Nord de notre pays et sur l’ensemble du territoire, est au prix d’une nouvelle compréhension de la situation du Mali et de la bande Sahélienne qui intègre les enjeux sous-régionaux et mondiaux.
− Nous réfutons le discours réducteur de la guerre ethnique.
− Nous déplorons le déficit de communication et de dialogue sur les causes internes et externes des questions majeures qui engagent le destin de la nation.
− Nous condamnons le recours à la violence armée comme mode de revendication dans un contexte démocratique et déplorons les pertes en vies humaines.
− Nous condamnons avec énergie les agressions physiques, la destruction des biens et la stigmatisation de nos compatriotes Kel-Tamasheq et de peau blanche, nos frères et sœurs, alliés et voisins de quartier, de ville qui aiment et se reconnaissent dans le Mali, leur patrie, notre patrie commune à tous.
− Nous soutenons résolument nos forces armées et de sécurité dans leur mission sacrée de défense du territoire national.
− Nous sommes Un Seul et Même Peuple, uni par une longue histoire multiséculaire de rencontres, de brassages et de résistances à l’adversité.
− La paix s’impose d’autant plus que les femmes et les enfants sont pris dans l’étau dans un conflit qui n’est pas le leur.
− Les élections de 2012 sont donc une occasion historique de renouveler la réflexion sur un projet de société adapté à nos réalités, davantage fondé sur la culture de l’être et des relations humaines à même de garantir la prospérité, la paix, la stabilité et la sécurité pour tous.
Nous signataires de la présente Déclaration, présentons nos condoléances les plus attristées aux familles des victimes et à toute la nation malienne. Nous exprimons notre solidarité à toutes les familles déplacées victimes de violences.
Bamako, le 7 février 2012
Les signataires
- Aminata Dramane TRAORE, Essayiste
- Abdoulaye NIANG, Socio-Economiste
- Adama SAMASSEKOU, Linguiste
- Filifing SAKO, Anthropologue
- Hamidou MAGASSA, Socio-Economiste
- Ismaïl DIABATE, Artiste-Peintre
- Jean-Bosco KONARE, Historien
- Mohamédoun DICKO, Historien
- Mariam KANAKOMO, Communicatrice
- Ousmane TRAORE, Administrateur civil, Juriste
- Doulbi FAKOLY, Ecrivain
- Kaourou DOUCOURE, Universitaire
- Abderhaman SOTBAR, Professeur
- Cheick PLEAH, Professeur
- Mohamed COULIBALY, Ingénieur
- Abdoul MADJIDOU HASSAN, Gestionnaire
- Mahamadou H. DIALLO, Imam
- Boubacar COULIBALY, Gestionnaire
- Mme SiSSOKO Safi SY, CAHBA
- Mme TOURE Alzouharata, Gestionnaire
- Mme Awa MEITE VAN TIL, Designer
- Dr Daba COULIBALY, Enseignant-Chercheur
 

España: huelga general contra la reforma laboral/Espagne : grève générale contre la réforme du Code du travail الاضراب العام في اسبانيا

Les 3 chiffres noirs de l'économie espagnole :
(Dé)croissance prévue en 2012 : - 1,7%
Dette privée : 217% du PIB
Chômage des jeunes : 49,9% (pour ne pas dire 50%...)
Ajoutons la dette publique : environ 800 milliards d'Euros, soit 70% du PIB, et elle n'a pas fini de monter
Reforma laboral española. Cuadro del despiece de empleados y trabajadores.
Cuadro guía para empresarios emprendedores
Réforme du travail espagnole. Tableau de dépeçage des employés et travailleurs.
Guide pour entrepreneurs et employeurs
Josetxo Ezcurra, Tlaxcala
 Grève générale: toi aussi! (en catalan)
Fermé pour cause de grève
Le 29 mars, on ne produit pas, on ne consomme pas, on ne vend pas
Pilar Moreno, Tlaxcala

Tunis-Rome: sit-in pour les disparus en mer

Tunisi, Venerdì 30 marzo 2012
Sit-in davanti all’ambasciata italiana,  Place Mongi Bali.
Marzo 2011, marzo 2012. Trecentosessantacinque giorni, cinquantadue settimane, dodici mesi, un anno. Questo il tempo che le istituzioni italiane e tunisine hanno fatto trascorrere senza dare alcuna notizia alle mamme e alle famiglie tunisine che chiedono dove siano i loro figli.
Si susseguono, intanto, i vertici tra Italia e Tunisia per arrivare a un nuovo accordo di cooperazione contro l’immigrazione: nuove frontiere, nuove espulsioni, nuove detenzioni per governare il desiderio di libertà e di libertà di movimento.
Da una sponda all’altra, a distanza di un anno, per le istituzioni e per le loro politiche le vite continuano a non contare.
Quelle di quei ragazzi, partiti subito dopo la rivoluzione declinando così, come libertà di movimento, la libertà appena conquistata; quelle delle loro madri e famiglie, che hanno portato nelle piazze e per le strade della Tunisia il loro dolore e la radicalità di una domanda sulla vita o sulla morte; le nostre, quelle di tutte e tutti noi che da questa parte della sponda abbiamo inseguito quella radicalità, convinte e convinti che ci stesse suggerendo qualcosa di fondamentale: che le vite, tutte, con i loro desideri di libertà, con il loro dolore, con il loro desiderio di vita, nonostante le istituzioni, nonostante le politiche migratorie e le loro pratiche di scomparsa, contano.
Per continuare a ribadirlo, come madri e famigliari   insieme alle donne italiane  che hanno  dato luogo alla campagna “da una sponda all’altra: vite che contano”, crediamo che sia ora indispensabile un’azione sulle due sponde che agisca la radicalità del nostro contare, di noi, tutte e tutti, da una sponda all’altra.
Venerdì 30 marzo saremo a Tunisi dalle ore 10, davanti all’ambasciata italiana mentre a Roma i collettivi di donne della campagna  saranno davanti all’ambasciata tunisina in Via Asmara dalle ore 12.
Le madri dei ragazzi dispersi
Tunis, vendredi 30 mars 2012: sit-in devant l’ambassade d’Italie, place Mongi Bali, à partir de 10 h.
Mars 2011, mars 2012: 365 jours, 52 semaines, 12 mois, 1 an. C’est le temps que les institutions italiennes et tunisiennes ont laissé s’écouler sans donner aucune nouvelle aux mamans et aux familles tunisiennes qui demandent où sont leurs enfants.
Entretemps, les sommets se succèdent entre Tunisie et Italie pour établir un nouvel accord de coopération contre l’émigration/immigration : des nouvelles frontières, des nouvelles expulsions, des nouvelles mises en détention pour étouffer le désir de liberté et de liberté de mouvement.
D’une rive à l’autre, un an plus tard, les vies ne comptent toujours pas pour les institutions et leurs décisions politiques.
Il s’agit des vies de jeunes partis immédiatement après la révolution, mettant en œuvre la liberté à peine conquise sous forme de liberté de mouvement; il s’agit des vies de leurs mères et familles, qui ont exprimé sur les places et dans les rues de Tunisie leur douleur et leur question radicale : sont-ils morts ou encore en vie ?
Il s’agit de nos vies, de celles de toutes celles et tous ceux qui, de ce côté-ci de la mer, ont accompagné cette exigence, convaincuEs qu’elle impliquait quelque chose de fondamental : que les vies, toutes les vies comptent, avec leurs désirs de liberté, avec leurs douleurs, avec leurs désirs de vie, en dépit des institutions, en dépit des politiques migratoires et de leurs pratiques de disparition.
Pour continuer à le répéter, en tant que mères et parents de disparus, aux côtés des femmes italiennes qui ont lancé la campagne “d’une rive à l’autre : des vies qui comptent”, nous pensons qu’il est désormais indispensable de mener une action sur les deux rives pour affirmer radicalement que nous toutes et nous tous, d’une rive à l’autre, nous comptons.
Le vendredi 30 mars, nous serons devant l’ambassade italienne à Tunis à partir de 10 h, tandis qu’à Rome, les collectifs de femmes de la campagne seront devant l’ambassade tunisienne, rue Asmara,  à partir de midi.
Les mères des jeunes disparus en mer


Un message d'Athènes

Salut à tous et a toutes,

Important: Les représentants de la Troïka viennent d'expliquer au Parlement Européen que l'objectif de leurs politiques appliquées à la Grèce est de "faire baisser les salaires et les pensions de ce pays au niveau de la Roumanie et de la Bulgarie, c.a.d. 150 euros par mois". La déclaration des représentants de la Troïka a été faite hier mardi durant  la session commune des commissions Économie et Emploi du Parlement Européen, en réponse à une question du député européen de SYRIZA Nikos Hountis.
  Après cette déclaration très officielle, il n'est plus permis le moindre doute quant a la suite des événements car ces salaires "bulgares" seront très bientôt combinés en Grèce avec un coût de la vie français ou allemand. En somme, la famine -et la barbarie- généralisée...
Alors, mobilisons-nous! Ça urge plus que vous le pensez!...
Amitiés
Yorgos
***

Murs d'Athènes, mars 2012

 Thanato stous politikous=mort aux politiciens
 Λευτερια στους κρατούμενους (Lefteria stous kratomenous)=liberté pour les détenus
για τη Συνωμοσία Πυρήνων της Φωτιάς (gia ti Synomosia pyrinon tis fotias)= de la Conspiration des cellules de feu (groupe anarchiste)


jeudi 22 mars 2012

Que les Allemands paient d’abord: relevé des dettes de guerre allemandes envers la Grèce

Traductions disponibles : English  Deutsch   
«  Que les Allemands paient d’abord leurs dettes de guerre à la Grèce avant d’exiger quoi que ce soit de nous. » Une demande qui se fait de plus en plus entendre en Grèce - et elle est justifiée.
Au début des années 40 les nazis ont imposé à la Grèce occupée une énorme contribution financière pour financer l’occupation allemande ainsi que ses objectifs stratégiques et militaires dans les Balkans, la zone méditerranéenne et la Libye. En outre la production vivrière grecque a été affectée au ravitaillement des troupes allemandes sur le front libyen.
Les Allemands avaient jeté leur dévolu sur le pétrole libyen et proche-oriental ainsi que les minerais des Balkans: ces derniers couvraient 20% des besoins de l’industrie de l’armement en antimoine, 50% de ses besoins en pétrole, 60% de la bauxite et la totalité du nickel. Parallèlement la Grèce était la seule zone à partir de laquelle les Alliés pouvaient contrer les Allemands dans l’espace balkanique.
Pour cette raison, les exigences allemandes d’une participation grecque aux frais de guerre étaient raides et entraînèrent des réactions du régime collaborationniste de Georgios Tsolakoglou lui-même, qui menaça de se retirer. Même Mussolini et le plénipotentiaire du Reich en Grèce, Günther Altenburg, pressèrent Berlin de baisser les frais d’occupation imposés à la Grèce.
La réquisition de tous les biens par la Wehrmacht a encore aggravé les charges liées à l’occupation allemande. Il en résulta la famine qu’Altenburg avait redoutée. Durant l’hiver 41-42 le nonce apostolique Angelo Roncalli (futur pape Jean XXIII) rapporta que le nombre des personnes mortes de faim dans la zone d’Athènes-Le Pirée avait triplé. Dans son journal Goebbels notait : « La faim est devenue une maladie endémique. Dans les rues d’Athènes, les gens meurent d’épuisement par milliers.» Le gouvernement britannique aggrava encore la situation en coupant les vivres à la Grèce pour pousser la population à se révolter contre les occupants.
La triple occupation de la Grèce (par l’Allemagne, l’Italie et la Bulgarie)
Les Allemands ne pouvaient ignorer plus longtemps l’aggravation de la famine, l’anarchie régnante et la sympathie croissante pour les Anglais. La famine induisit des révoltes populaires et attira de plus en plus de gens vers la résistance. À Rome, lors de la Conférence financière germano-italienne de janvier à mars 1962, le sujet figurait tout en haut de l’ordre du jour. Les Allemands ne voulaient pas renoncer à tirer de la Grèce des fonds substantiels et la Conférence s’acheva par une impasse. Alors le banquier italien d’Agostino, plénipotentiaire en Grèce pour l’économie, proposa un emprunt obligatoire : les fonds exigés par les Allemands au-delà des frais directs de l’occupation prendraient la forme d’un crédit accordé à l’Allemagne et à l’Italie.
 Un « accord de crédit » fut signé le 14 mars 1942 par Altenburg et Gidzi, respectivement plénipotentiaires allemand et italien pour la Grèce. La Grèce elle-même n’était pas présente, n’ayant pas été invitée. Selon cet accord
  • le gouvernement grec devait acquitter 1,5 milliards de drachmes par mois pour couvrir le frais d’occupation ;
  • les fonds exigés de la Banque nationale de Grèce au-delà de ce montant étaient considérés comme un emprunt à 0% accordé aux gouvernements italien et allemand, en drachmes;
  • l’emprunt serait remboursé plus tard;
  • cet accord était rétroactif jusqu’au 1er janvier 1942.
Aucune date n’a été fixée pour le début du remboursement. Le Ministre grec des finances a chargé le directeur de la Banque centrale d’exécuter cet accord.
À la suite de trois modifications, cet accord imposé a été transformé en emprunt normal, donc portant intérêt, et exprimé dans une devise stable.
Selon la Banque de Grèce, le montant de l’emprunt (sans les intérêts) s’élevait à 227.940.201 dollars US (valeur de 1944),  selon Altenburg à 400 millions de DM d’après-guerre. Avec les intérêts et au cours actuel, l’emprunt se monte à plusieurs dizaines de milliards d’euros.
L’emprunt grec est distinct de la question des réparations. Il ne tombe donc pas sous le coup de l’accord du 27 février 1953 sur les dettes extérieures allemandes, à Londres, qui exonère l’Allemagne de toutes réparations et compensations.
La Grèce a constamment fait valoir à toutes les Conférences internationales en rapport avec ce sujet que cet emprunt et la demande de réparations sont deux choses distinctes - notamment à la Conférence sur les réparations de 1945, à la Conférence de Paris en 1946 et à la Conférence des Ministres des Affaires étrangères à Londres en 1947. La Grèce a constamment réclamé la restitution des dettes d’occupation allemandes. En 1967, la partie allemande a fait état, à l’occasion d’un entretien germano-grec, d’un écrit de Constantin Caramanlis par lequel il aurait renoncé à au remboursement de l’emprunt. Plus tard cette affirmation a été corrigée: il s’agissait d’un renoncement verbal. Caramanlis a démenti cette affirmation. Dans une note diplomatique datée du 31 mars 1967, l’Allemagne a fini par reconnaître que Caramanlis n’avait jamais renoncé à cette exigence.
L’Allemagne l’a toujours rejetée au prétexte que cet emprunt tombait sous le coup de l’Accord sure les dettes allemandes de 1953 ; que Constantin Caramanlis y avait renoncé ; que de telles demandes sont prescrites au bout de 50 ans. (Or la Grèce la formule depuis 1945).
La position allemande ne repose sur aucune base légale. Depuis la chute du Mur, l’Allemagne ne peut même plus faire valoir qu’on ne peut pas adresser une telle demande à un pays coupé en deux. Elle doit désormais être satisfaite, le gouvernement grec peut le réclamer, ou la Banque de Grèce ainsi qu’un de ses actionnaires, ou encore le peuple grec par l’intermédiaire de ses institutions. Il existe des précédents, pour la Pologne et la Yougoslavie, que l’Allemagne nazie avait obligées à lui octroyer de tels emprunts, que l’Allemagne (de l’Ouest) a remboursés respectivement en 1956 et 1971.

O Κάρλος Λατούφ ζωγραφίζει για την Παλαιστίνη στην Ελλάδα Carlos Latuff dessine pour la Palestine en Grèce

Les 23 et 24 mars, le dessinateur brésilien Carlos Latuff animera avec son travail des journées de solidarité avec la Palestine, le vendredi 23 mars,à partir de 18 h 30 au Marché populaire de Kypselis, rue Fokionos Negri, à Athènes et le samedi 24 mars à Halkídha, à partir de 18 h 30, à la Bourse du travail d'Eubée.
Αθήνα και Χαλκίδα



Ο CARLOS LATUFF ΖΩΓΡΑΦΙΖΕΙ ΓΙΑ ΤΗΝ ΠΑΛΑΙΣΤΙΝΗ

ΣΥΖΗΤΗΣΗ: ΣΙΩΝΙΣΜΟΣ-ΚΑΤΟΧΗ-ΑΝΤΙΣΤΑΣΗ

ΔΗΜΟΤΙΚΗ ΑΓΟΡΑ ΚΥΨΕΛΗΣ

ΠΑΡΑΣΚΕΥΗ, 23 ΜΑΡΤΙΟΥ 2012, ΑΠΟ ΤΙΣ 6.30’ ΤΟ ΑΠΟΓΕΥΜΑ

Ο Carlos Latuff, ο Βραζιλιάνος πολιτικός σκιτσογράφος, γνωστός και για τα σκίτσα του για τον πολύχρονο απελευθερωτικό αγώνα του Παλαιστινιακού λαού, έρχεται στην Αθήνα καλεσμένος της Δικτύωσης Αλληλεγγύης στην Παλαιστινιακή Αντίσταση.

Η εκδήλωση θα πραγματοποιηθεί στη Δημοτική Αγορά Κυψέλης (Φωκίωνος Νέγρη), την Παρασκευή 23 Μαρτίου 2012, και το πρόγραμμά της έχει ως εξής:

18:30 Μικροί και μεγάλοι ζωγραφίζουμε με όλων των ειδών τα υλικά

20:00 Ο Latuff ζωγραφίζει και συζητά για το πολιτικό σκίτσο

21:00 Συζήτηση «Σιωνισμός – Κατοχή – Αντίσταση»

Παράλληλα, στο χώρο της Δημοτικής Αγοράς Κυψέλης θα λειτουργεί έκθεση πολιτικών σκίτσων του Carlos Latuff.
Αντίστοιχη εκδήλωση διοργανώνει η Δικτύωση Αλληλεγγύης στην Παλαιστινιακή Αντίσταση μαζί με την Ομάδα Δράσης Χαλκίδας και τη στήριξη του Ε.Κ. Ευβοίας, στη Χαλκίδα το Σάββατο, 24 Μαρτίου 2012 και ώρα 19:00 με θέμα: «Ο Latuff ζωγραφίζει και συζητά για το πολιτικό σκίτσο».

Η εκδήλωση θα γίνει στην αίθουσα του Εργατικού Κέντρου Ευβοίας, στη Χαλκίδα.

Μικρό βιογραφικό

Ο Carlos Latuff γεννήθηκε στη Βραζιλία το 1968. Ο ανεξάρτητος πολιτικός σκιτσογράφος έχει ασχοληθεί μ’ ένα εύρος θεμάτων συμπεριλαμβανομένων της αντι-παγκοσμιοποίησης, του αντι-καπιταλισμού καθώς και της εναντίωσης στις επεμβάσεις των αμερικανικών στρατευμάτων. Έγινε γνωστός κυρίως για τα σκίτσα του σχετικά με την κατοχή της Παλαιστίνης από το Ισραήλ και, πιο πρόσφατα, γι’ αυτά που είχαν ως αναφορά την λεγόμενη «αραβική άνοιξη».

Ο αγώνας των Παλαιστινίων τον απασχόλησε ιδιαίτερα μετά την επίσκεψή του στην περιοχή τη δεκαετία του 1990. Τα σκίτσα του κατέκριναν έντονα το Ισραήλ γι’ αυτό και προκάλεσαν αντιδράσεις από τους σιωνιστές.
Τα έργα του τα δημοσιεύει ο ίδιος σε διάφορα ανεξάρτητα sites και blogs.




mercredi 21 mars 2012

De Turquie : méfiez-vous du génie du discours islamiste

Türkçe Türkiye: İslamcı Söylemin Cinine Dikkat


Ces jours-ci, en suivant ce qui se passe en Tunisie, avec le parti islamiste modéré Ennahdha au pouvoir, on a une sensation de déjà vu, comme si on revoyait un film ennuyeux..

 
Rachid Ghannouchi salue Erdoğan  à son arrivée à Tunis le 14 septembre 2011. Photo: Fethi Belaid/AFP
Rachid Ghannouchi, le leader d’Ennahdha, a l’air de considérer que son parti a été le déclencheur du printemps arabe, pas seulement en Tunisie mais dans tout le monde arabe,  sans oublier qu’ils pensent être le seul exemple d’une transition démocratique réussie. Ajoutez cette rhétorique  aux déclarations antérieures du parti : « C’est nous qui avons le plus souffert sous le règne de Ben Ali , pas les gauchistes. »

Tout cela me rappelle les premières années au gouvernement du parti AKP. Pas étonnant que le parti Ennahdha ait répété qu’il adoptait le « modèle turc » durant la campagne électorale pour l’Assemblée constituante. Il est évident qu’Ennahdha a emprunté le « génie du discours » de l’AKP, qui a longtemps paralysé l’opposition turque en établissant son hégémonie discursive  dans les débats publics et dans les cercles intellectuels.
Cet habile « génie du discours », comme nous nous avons pu nous en rendre compte en Turquie,  ne sert pas seulement les objectifs de son maitre. Il légitime aussi automatiquement toute politique contre la démocratie et l’égalité sociale et s’oppose même parfois au bon sens. Un véritable couteau suisse !

Ma participation à une table ronde sur le “Printemps arabe" à Paris m’a amenée à penser que les révolutionnaires tunisiens aussi bien qu’égyptiens devraient être mis en garde contre les merveilles de ce génie discursif. Ce n’est pas parce que le conservatisme sunnite est en train de voler leurs révolutions. Il est plutôt nécessaire de les mettre en garde contre le genre d’atmosphère politique schizophrène auquel ils vont être soumis.

Quand l’AKP est arrivé au pouvoir, il a commencé à utiliser la rhétorique des opprimés à chaque occasion. Et comme l’humiliation des gens à sensibilité religieuse par l’élite modernisée et occidentalisée de l’Etat est une réalité dans l’historie de la Turquie moderne, cette rhétorique n’était pas entièrement sans fondements.

En outre le Premier ministre Recep Tayyip Erdoğan  venait de sortir de prison. Il avait été condamné pour avoir cité un poème considéré comme une atteinte à la laïcité du pays : « Les mosquées seront nos boucliers et les minarets nos lances. ». Au fil du temps nous avons vu les opprimés devenir des oppresseurs, naturellement avec un peu d’aide du génie du discours !

Ennahdha a emprunté le « génie du discours »  de l’AKP  qui a longtemps paralysé les opposants turcs. A chaque fois qu’on l’interrogeait sur les prisonniers politiques, Erdoğan  parlait de son propre emprisonnement, laissant entendre que ceux qui ne l’avaient pas soutenu alors n’avaient pas de droit à la parole maintenant. A chaque fois que l’opposition abordait le thème du recul des libertés individuelles, Erdoğan  et ses experts en brosse à reluire évoquaient les années de restriction de la liberté de culte pour la frange conservative religieuse de la population.

Finalement, lorsqu’ on critiquait la transformation des droits sociaux en bienfaisance et charité religieuses, Erdoğan  utilisait la rhétorique banale selon laquelle « la justice a pour source la religion. »

C’est pourquoi il est devenu fameux par ses remarques décisives pour clore tout débat qui va à l’encontre de ses intérêts. Cela a été particulièrement vrai pendant les premières années de son mandat. L’opposition, à savoir les classes moyennes et supérieures laïques, modernes et occidentalisées étaient horrifiées à chaque discours à référence religieuse. Les Kémalistes qui rêvaient d’un État laïc et occidentalisé, étaient scandalisés à chaque fois qu’on évoquait  le hijab ou les cours de religion à l’école.
Certes, le Premier ministre n’a jamais commis l’erreur de son prédécesseur en disant ouvertement « nous sommes le parti de Dieu », mais, la plupart du temps, ses discours avaient une connotation religieuse.

Dans un premier temps, l’opposition a este choquée. Elle ne savait pas comment réagir face à toutes ces références religieuses dans divers débats politiques. On peut conclure que dans un pays à majorité sunnite, tout débat entre laïcs et religieux s’avère être stérile, vu que seuls les musulmans sunnites ont raison.

C’est ce qui s’est passé : l’opposition qui avait construit son discours sur la laïcité, n’était pas seulement écrasée par le « génie du discours », mais aussi ridiculisée  et humiliée..

Le « génie du discours » était assez malin pour se servir de Dieu et de la démocratie d’une façon cohérente. C’est pourquoi, Tunisiens et Égyptiens, vous devez faire attention.

Aujourd’hui, les Tunisiens, en particulier ceux qui ont combattu pour la démocratie à la Kasbah, et les Égyptiens de la Place Tahrir qui ont formé un ensemble homogène malgré leurs différences, sont traumatisés par les discours d’Ennahdha et du Parti Liberté et Justice  sur la Charia.

En Tunisie, après le dernier discours de Ghanouchi sur la fermeture des bars et la loi islamique comme source d’inspiration de la nouvelle Constitution, la réaction des jeunes me rappelle celle d’un cerf, paralysé par les phares des voitures au milieu de l’autoroute. Je me souviens d’avoir vu les mêmes visages il ya dix ans en Turquie.

Comme leurs homologues turcs, ils sont restés paralysés au lieu de s’engager dans le processus politique du moment. Car dans un pays conservateur à majorité musulmane, il est presque impossible que l’opposition construise un contrepoids laïque, sans apparaitre comme le porte-parole du diable aux yeux des gens simples, ou comme des bourgeois insouciants qui ne se préoccupent que de leurs plaisirs hédonistes .

C’est ce qui a été et est encore le cas de la Turquie. Quand Erdoğan  a annoncé son intention de créer une « génération religieuse », sa déclaration a été fortement critiquée. Il a répliqué : «  Voulez-vous que nos enfants deviennent des toxicomanes ? » Ce qui a laissé ses opposants sans voix. Et il a ajouté : « Je veux une génération religieuse et vindicative. »
Je crois avoir dit qu’il était reconnu par ses remarques décisives.

Il faut reconnaitre que dans les pays à majorité musulmane, il est presque impossible de débattre avec un gouvernement islamique au look moderniste qui s’engage dans le néo -libéralisme. Ce n’est pas seulement que les citoyens de votre propre pays peuvent être facilement montés contre vous, c’est aussi que toute la planète qui, ayant adopté la démocratie made in USA, vous laissera seuls à votre sort désespéré. Le danger réel ne vient pas des partis politiques annonçant ou pensant être le parti de Dieu sauf lorsque, d’une manière ou d’une autre, ils se proclament représentants de la démocratie.

En Turquie ceci signifie que si vous êtes contre l’AKP, vous êtes forcément partisans des coups d’État militaire et de l’intervention des militaires dans la vie politique.

On verra ça prochainement en Tunisie : si vous êtes contre Ennahdha, vous êtes des suppôts de l’ancien régime. Je pense qu’en Egypte le « génie du discours » trouvera quelque chose d’approprié qui s’adaptera aux besoins locaux.

Une autre remarque importante : le « génie du discours » a le don de réécrire l’histoire d’une manière impitoyable. J’attends une rafale rhétorique, sur le mode turc, en Tunisie tout comme en Egypte de : «  Nous sommes le vrai peuple  de ce pays, vous êtes l’élite, taisez-vous. »

Ces  partis politiques créent une impasse, moyennant le « génie du discours » pour affirmer qu’ils sont les vrais citoyens opprimés, représentants de  la démocratie.

Argument imbattable, non ? Les jeunes Tunisiens et Égyptiens dont le sang a coulé pour défendre la liberté et l’égalité, sont-ils donc dans une situation complètement désespérée ? Je ne crois pas.

En observant la politique de l’AKP durant une décennie, j ai vu trois actions d’opposition qui n’ont pas abouti à sa liquidation .Ces groupes ont utilisé à leur tour le « génie du discours » pour déclarer qu’ils étaient les citoyens opprimés et qu’ ils représentaient le peuple et la démocratie.


Halkevleri dans la rue...
Un de ces groupes est le Halkevleri (maison du Peuple ),  un mouvement de base agissant pour les droits sociaux. Il est parti en guerre contre la politique de l’AKP, consistant à transformer les droits sociaux en objet de charité. Leur argument principal était que la distribution de pain et de charbon par des organisations religieuses était humiliante et que la nourriture et le logement étaient des droits constitutionnels fondamentaux.


...et la réponse policière
La seconde action émanait des Collectifs étudiants (Öğrenci Kollektifleri), qui ont lancé des actions sur des questions relativement mineures comme le prix des tickets des bus et les frais d’inscription à l’université.
Les deux groupes étaient de gauche, sans aucune connotation religieuse. Le gouvernement les a étiquetés « organisations terroristes », ce qui a montré le vrai visage de l’AKP comme oppresseur des étudiants et des classes démunies.
La troisième action était un « Iftar » qui a  rassemblé ledess gauchistes et des islamistes politiques qui ont l’égalité sociale à leur programme.
Durant le mois de Ramadan, ils ont effectué la rupture du jeûne en face d’un hôtel 5 étoiles, connu pour être un endroit branché par les nouveaux riches de l’AKP.

Ce qui montre qu’on peut sortir de l’impasse créée par le « génie du discours ». La solution est de construire une opposition qui défend les droits sociaux ;y mélanger ou non des connotations religieuses dépend naturellement de l’attitude de chacun.
Ceci dit, ce n’est pas tant une nouvelle génération religieuse que l’AKP veut qu'une génération obéissante.. Sinon, il aurait été content de voir les jeunes faire la fête durant le Ramadan, sans se soucier du fait qu’ils le fassent dans la rue.
Assurément, adopter cette stratégie ne vous rendra pas moins seuls dans le monde. Les politiques européennes et usaméricaines qui ont déjà étiqueté ces pays démocraties islamiques modérées tamponnées « bon pour l’Orient » ne vont pas se réjouir de voir une opposition fondée sur les problèmes de justice sociale.
Personnellement, je pense que les Occidentaux qui glorifient la démocratie dans ces pays ont la trouille quand ils entendent parler de « justice sociale ». Qu’à Dieu ne plaise ! Cela pourrait finir en guerre de classes !
Ceux qui, dans les médias internationaux, applaudissent les jeunes de la place Tahrir "sans idéologie" n’aimeraient pas être ramenés à reconnaître que les discours gauchistes ont survécu malgré les "compagnes de lutte contre le communisme", lancées dans les années soixante du siècle dernier.
Mais au moins, une opposition basée sur les droits et l’égalité sociale fera, pour changer, du « génie du discours » et non de l’opposition le cerf paralysé par les feux d’une voiture.
 

lundi 19 mars 2012

Netwar 2.0 : Vers une convergence de la rue et du réseau

par Giorgio Griziotti - Dario Lovaglio - Tiziana Terranova
Il y a un an environ une nouvelle force d'expression de la multitude sur le réseau s'est imposée à l'attention mondiale, d’abord dans la bataille Wikileaks et ensuite, à partir de la Tunisie, dans les révolutions arabes et dans les mouvements 15M et Occupy.

Après un an clé, dense de menaces et de promesses, ces dernières nées d'un mouvement mondial complètement nouveau, la gouvernance financière, consciente de la grande menace que l’autocommunication horizontale des multitudes fait peser sur sa domination, cherche à reprendre avec force l’attaque contre la liberté sur le réseau.


Arrivent alors la tentative, peut-être déjouée, de faire passer le Stop Piracy Online Act (SOPA) et le Protect ip Act (PIPA), puis la fermeture effective de Megaupload aux USA.


Aujourd'hui nous sommes appelés à un autre grand combat mondial contre ACTA (Anti-Counterfeiting Trade Agreement), traité liberticide de défense du copyright et de pénalisation de la contrefaçon.  Préparé en secret par les exécutifs d'une quarantaine de Pays et sans aucun débat public ou parlementaire, ACTA, dont le rapporteur français, Kader Arif, a tout quitté  en claquant la porte ( « Je ne participerai pas à cette mascarade » a-t-il déclaré ), a été déjà signé par Obama, qui pourtant s'était refusé à avaliser SOPA.  Il ne sera pas adopté en Europe avant d’être éventuellement approuvé par le Parlement Européen. Les manifestations en Pologne et dans de nombreux Pays dont la France et les 2,5 millions de signatures en désaccord ont poussé la Commission Européenne à prendre quelques distances.  Elle a sollicité l’avis de la Cour européenne de justice pour déterminer si l’accord était incompatible, d’une façon ou d’une autre, avec les principes fondamentaux de l’UE ou avec la protection des droits de l’homme.


Le renforcement du copyright met en évidence un paradoxe : d'un côté ce renforcement est indispensable au capital pour maintenir et augmenter sa position rentière basée sur la capture de du « temps de cerveau disponible » et la propriété des données, de l'autre il entrave la coopération sociale qui est hautement productive parce qu’elle n’est pas fondée sur la division du travail mais construite autour de la valeur produite par la circulation de flux de désirs, des perceptions, des affects.  Cette circulation, qui excède la capacité de capture du capital, produit des nouvelles sédimentations de sens et une immense production de commun.


Cette contradiction est au cœur de  la bataille interne parmi les deux ailes du capitalisme :  celle des historiques, les incumbent comme dit Yochai Benkler[1], constituée par les conglomérats de l’Entertainment, pour lequel le copyright est vital et  celle des Corporates du Web 2.0 appelée par Mackenzie Wark[2] “ la classe vectorielle”  et qui s'alimente vraiment de cette production commune. Il s’ensuit que SOPA et PIPA sont d'un côté défendues par les Majors et par les cariatides des media verticaux tels Murdoch et compagnie[3] et de l'autre combattues par Google, Facebook, Ebay, Amazon et même par le converti de dernière minute: Microsoft… cependant il s’agit  de faux cavaliers blancs dont l’objectif n'est pas une présumée liberté d'expression sur le net mais la construction d’énormes et rentables chasses gardées, comme justement signalé par Infofreeflow [4]. Nous ne pouvons donc pas être d'accord avec Manuel Castells lorsqu’il dit  dans une interview[5] récente que Google est « plus un allié qu'un ennemi » car  il est simplement « un business et pas une idéologie ». Une contradiction dans les termes lorsque on parle d'une des premières capitalisations mondiales ;  et que dire ensuite  de la stratification ethnique pratiquée sur son célèbre campus, Googleplex, où les travailleurs ont un badge de couleur différent, de droits d'accès différents et de formes d’interdiction de socialisation ?


De manière plus générale le débat sur Internet après la fermeture du site Megaupload par le FBI, renforcé par la décision de Twitter de mettre en place une autocensure qui fait le jeu des pouvoirs constitués, a été caractérisé par deux tendances: d'une part les enthousiastes du réseau qui voient en Megaupload un medium important grâce à ses caractéristiques d'horizontalité et de liberté de l'échange d’information, de l'autre ceux qui critiquent un capitalisme spécifiquement numérique fondé sur la capture et l’exploitation de données.


Le concept « capitalisme numérique» suggérerait la séparation entre un capitalisme en réseau et un autre « matériel », où le premier serait caractérisé par un conflit dialectique entre le parasitisme et la coopération sociale et le second par un autre conflit entre la figure de l'entrepreneur et celle de l'ouvrier.


Cependant le capitalisme ne fait pas de distinction entre production immatérielle et matérielle et cela est vrai pour les entreprises du numérique telles que Amazon ou Apple. Le capitalisme numérique n'est pas une sphère en elle-même pour reprendre la critique traditionnelle du capitalisme cognitif dont la définition exclut la dimension matérielle de la production et de l'exploitation, thèse soutenue par l’article de Wu Ming sur Fétichisme de la marchandise numérique et exploitation cachée : les cas Amazon et Apple[6]. Les conditions de travail dans les entreprises numériques— des vies remplies de stress et de dépressions et un nombre alarmant de suicides — indiquent clairement que ce qui se produit dans les entrepôts d'Amazon et les usines à smartphones du chinois Foxconn n'est pas de nature différente des impitoyables dictats “up or out” qui poussent à une compétitivité au dernier sang dans les gratte-ciels de La Défense.


Même dans le secteur des technologies numériques de l'information et de la communication nous assistons à des grands investissements qui vont des immenses, bien que cachées et anti écologiques, servers farms de Google et en général du Cloud Computing jusqu'au déploiement  de nouveaux réseaux (4G), alors qu’en même temps on utilise toutes les pratiques possibles de réduction des coûts et de discrimination du travail salarié.  La massive adoption forcée de l'offshore vers l'Inde ou autres pays à bas salaires ou encore la récente loi française qui précarise et rend expulsables les jeunes immigrés à peine sortis des Écoles d'ingénieurs payées à prix élevé en sont une démonstration.
Capitol Hill, Seattle, décembre 2011: sur un mur du bâtiment occupé puis évacé violemment par la police, ces mots de Thomas Müntzer (1489-1525), chef de la révolte paysanne allemande du XVIème siècle, prononcés sous la torture avant qu'il soit décapité : "Toutes choses sont communes" ou, avec les mots d'ajourd'hui :"Tout pour tous !"
Le capitalisme numérique est aussi fortement impliqué dans la gouvernance globale du capitalisme financier. Celui-ci opère dans un continuum de production et de circulation qui simultanément intensifie les rythmes d’exploitation et de prolétarisation du travail salarié et siphonne une large composante du travail libre produit avec des dispositifs (PC, smartphones et tablettes) souvent acquis par des mécanismes de financement à crédit. Cela force l’utilisation de moyens de paiement compulsifs (iTunes, Ebay/Paypal, Amazon Oneclick) et pousse certains acheteurs dans la boucle de la dette et de l’exploitation financière.


Sans nier l'existence de l'exploitation de la production matérielle en particulier dans les usines on veut souligner que le réseau est l’attracteur qui catalyse et réorganise l’ensemble des configurations productives au-delà de toute division fictive entre matériel et immatériel, réel et virtuel, ou entre media verticaux et horizontaux. Le réseau en effet n’est pas constitué seulement par les flux de données, la programmation ou le développement et les déploiements des logiciels mais aussi par les infrastructures, les serveurs, les laptops, les smartphones et autres tablettes et par les conséquences implicites à l’envahissement pervasif de ces dispositifs.


Dans la mesure où nous n'assistons pas à un clash entre deux capitalismes, mais à un procès de reconfiguration qui s’organise autour de l'hégémonie de la finance, de l'information et de la circulation, il semble clair que le seul mode pour changer la situation présente passe par l'auto-organisation du travail vivant des multitudes sur le territoire et dans les réseaux.
ANONYMOUS et OCCUPY
Parmi les exemples d'auto-organisation multitudinaire en réseau qui ont émergé depuis quelques années l'expérience d'Anonymous nous semble absolument cruciale. Ce groupe est au centre de la grande réaction en réponse à la fermeture de Megaupload et à la mobilisation contre Acta. Sans vouloir refaire toute son histoire en quelques lignes Anonymous naît pratiquement avec la campagne contre la secte de scientologie et s’affirme ensuite avec celle du soutien à Wikileaks qui attaque directement les plateformes névralgiques de paiement comme Visa, Mastercard, Paypal, coupables d'avoir bloqué, de leur propre  initiative et sans aucune justification juridique, les dons au site.


Suit l'OpTunisie en soutien à la révolte, et ensuite l'importante opération contre Sony, en réponse à l’arrestation du hacker George Hotz, qui a permis l’accès public au catalogue de la multinationale.


Il est intéressant de remarquer comment Anonymous et les actions des hackers sur le net interviennent de façon toujours plus complémentaire et intégrée aux mouvements Occupy et 15M et au même moment en alternative aux plateformes de communication sociale corporatives comme Facebook ou Twitter. Au-delà de l'osmose et des évidentes différences de contexte et d'action parmi les grandes instances du mouvement global, de fortes similitudes émergent sur les principes et les modalités d'organisation.


Le fonctionnement de l'infrastructure technique qui héberge le débat politique d'Anonymous est axé autour de l'Internet Relay Chat (IRC), la première forme de communication instantanée (chat) sur Internet, qui permet le dialogue simultané de groupes entiers de personnes au moyen de chambres de discussion appelez “canaux”. La topologie du réseau IRC, comme souligné par Dmytri Kleiner[7], préserve les principes de la communication parmi les pairs (peer to peer) par rapport à l'actuelle configuration de type client/serveur des plateformes de social networking basées sur le web.


Les Anonymous ont créé et utilisent des multiples canaux autonomes comme lieux de débats politiques et pour d’autres activités à fond plus humoristique et potache (lulz) ou consacrées aux discussions sur le social. Les canaux de débat ont une fonction semblable à celle des assemblées du mouvement Occupy et 15M et dans les deux cas la coordination de ces instances de discussion est lâche et non-hiérarchique.


Comme évoqué dans un récent article[8] il existe un code éthique de fonctionnement d’Anonymous selon lequel le leadership ou la célébrité ne sont pas, dans aucun cas, une fin en soi.  Anonymous offre ce que Mike Wesch[9] définit comme “une critique virulente du culte postmoderne de la célébrité, de l'individualisme et du concept d'identité…” .  Ceci s'exprime en premier lieu dans le refus d'identification forcée avec son nom et prénom, ce qui habituellement définit le modèle politique-économique de plateformes comme Facebook. L'anonymat dans ce cas permet d'exercer, dans l’environnement électronique, le même contrôle que celui qu’ont adopté les assemblées du 15M pour éviter un comportement egocentrique ainsi que pour une obstinée et scrupuleuse recherche du consensus.


Les canaux IRC qui constituent les différentes factions d'Anonymous sont ouverts au public mais ils demandent un minimum de compétences techniques et de connaissances de l’environnement  pour y accéder ou en devenir des administrateurs (ops). Les « ops » ont la charge de maintenir l’ordre et donc la possibilité d'exclure des personnes qui transgressent les règles culturelles et les règlements en vigueur : sur le canal Anonops par exemple il est défendu faire l’apologie de la violence ou de s’en  prendre aux media.  Les « ops » peuvent participer au débat mais ils ne déterminent pas les plans d'action ou les opérations des Anonymous.


Comme dans le mouvement des Indignados, chez les Anonymous ce sont aussi les personnes qui s'investissent le plus dans le travail qui détiennent une autorité naturelle ;  cependant cela ne leur permet pas d’exercer une influence particulière. Les règles sont plus strictes pour ce qui concerne les relations vers l'extérieur : un Anon qui ne se serait pas impliqué dans les actions directes, de type Déni de Service (Ddos[10] ), et qui se permettrait d'en parler avec un journaliste risque l'expulsion. Chez les Indignés tous peuvent s'exprimer sur le mouvement à titre personnel dans les mass media verticaux mais personne ne peut s'en servir pour s’ériger comme représentant ou porte-parole.


À partir de cette convergence réelle on peut présumer qu'à l’avenir les barrières techniques qui séparent ces instances du mouvement vont se dissoudre; aujourd’hui nous portons sur nous des dispositifs connectés toujours plus puissant, qui permettent à nos corps et à nos esprits d’interagir par le moyen de nos sens avec les réseaux. Nos vies (le grec bios) sont maintenant plus socialement intégrées, de manière plus intense et continue, via l’internet mobile, via de multiples réseaux et des millions d’applications : un nouveau paradigme que nous avons défini comme bio-hypermédia[11].


Nous avons le sentiment que le bio-hypermédia sera un medium clé et qu’il permettra d’intégrer encore plus significativement aussi bien les mouvements de la rueque ceux qui se manifestent en réseau.